27/09/2025

Taiwan Today

Taiwan aujourd'hui

Belles du Sud

01/05/2003
Le charme des plages de Kenting ne doit pas faire oublier les autres richesses de la région - ses côtes à mangrove, ses vestiges historiques et les beautés bucoliques de son parc national.

>> La péninsule de Hengchun est l'une des cinq régions mises en avant par l'office du Tourisme. A juste titre : ce petit paradis tropical a bien plus à offrir que ses exceptionnels couchers de soleil

Mentionnez ici le hsien de Pingtung, et ce sont des images de rochers fantastiques, de récifs coralliens et de plages de sable fin qui viennent à l'esprit. Au fil des années, le Parc national de Kenting en est venu à symboliser non seulement la péninsule de Hengchun, en forme de croissant, qui termine l'île en sa pointe sud, mais aussi l'ensemble de la région. Les campagnes de promotion organisées par l'office du Tourisme en collaboration avec les autorités locales ont provoqué un regain d'intérêt pour l'endroit.

En général, les touristes ne manquent pas d'inclure à leur itinéraire le Musée national de biologie marine et son aquarium, installés dans la petite ville de Checheng. Pour la plupart, ils visitent aussi la magnifique baie de Dapeng qui renferme encore des vestiges de l'histoire coloniale de Taiwan et est connue pour ses fruits de mer, et ils font un détour par les sources chaudes de Sihchongsi.

C'est en 1984 qu'a été créé le Parc national de Kenting - le premier à Taiwan - qui enregistre aujourd'hui plus de 6 millions de visiteurs chaque année. Comme les autres parcs nationaux qui ont suivi, il est divisé en zones aux fonctions différentes, afin de minimiser l'impact de la présence humaine : zones protégées, aires de loisirs, sites panoramiques, zones de protection écologique et enfin sites culturels et historiques. « Un parc national doit assurer l'équilibre entre conservation et récréation, estime Lee Yang-sen [李養盛], le superintendant du Parc national de Kenting. Les structures mal intégrées doivent être supprimées pour restaurer l'harmonie naturelle. » La direction du parc a donc entrepris de démolir les bâtiments construits sans permis et de retirer la signalisation sauvage.

Pour ajouter un peu de sel au séjour des touristes, dont les activités principales sont concentrées autour des plaisirs de la table et du farniente au soleil, Lee Yang-sen souhaite mettre l'accent sur les dimensions écologiques et culturelles de la région. « Si vous arrêtez votre regard sur cette fleur parce que vous la trouvez belle, ça n'est que le premier pas. Un touriste plus subtil essaiera d'en apprendre davantage et découvrira par exemple que ce qu'il a pris au premier coup d'œil pour une fleur est en réalité un groupe de feuilles colorées caractéristiques d'une plante verte un peu particulière. »

Cette année, la direction du parc propose une série d'activités « écolos » : observation des oiseaux, découverte de la vie des insectes, exploration des richesses de la flore locale, tournée des formations rocheuses remarquables de la région, plongée aux alentours des récifs coralliens.

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S'inquiétant de la présence de troupes japonaises dans les environs, la cour des Qing installa une colonie de peuplement à Kenting, protégée par un fort.

Justement, si l'on s'intéresse à la vie des océans, c'est au Musée national de la biologie marine de Kenting qu'il faut se rendre. Inaugurées en 2000, les installations en extérieur et en intérieur incluent notamment un tunnel transparent de 81 m de long, aménagé dans un immense aquarium de 5,7 millions de m3 d'eau. Cette attraction spectaculaire a attiré quelque 2,5 millions de visiteurs l'année dernière, passant dans le peloton de tête des lieux touristiques les plus fréquentés, avec le Zoo de Taipei et le Musée des sciences naturelles de Taichung, dans le centre de l'île.

Lin Chung-hsiao [林忠孝], le secrétaire général du musée de Kenting, ne cache pas sa fierté. « Il n'y avait jamais eu d'aquarium de cette envergure à Taiwan, explique-t-il, et nous sommes aussi les premiers à avoir adopté le modèle BOT pour une institution nationale à mission pédagogique. [NDLR : BOT est l'acronyme de build-operate-transfer, un système par lequel une société privée assure l'exploitation commerciale des infrastructures qu'elle a construites pendant un certain nombre d'années avant d'en transférer la propriété et la gestion au secteur public.] Nous avons donc dû prendre un certain nombre d'initiatives, depuis la création de l'office préparatoire du musée en 1991. » Le musée a d'ailleurs obtenu l'approbation d'experts étrangers pour la qualité technique de son architecture : en 2001, il a remporté le prix d'excellence décerné par l'association American Consulting Engineers, devançant plus de 2 000 autres projets en compétition. En cours d'élaboration, une exposition présentant les océans du globe à travers les âges grâce à la technique de l'imagerie numérique sera inaugurée en 2007. Elle s'ajoutera aux thèmes présentés actuellement au public : les eaux qui entourent Taiwan et le royaume corallien.

Pour ceux qui s'intéressent surtout aux plages tropicales et aux sports nautiques, la baie de Dapeng, à une heure en voiture de la ville de Checheng, fait partie des destinations incontournables. « Avec les infrastructures en cours de réalisation - un parcours de golf, un parc d'attractions et un port de plaisance -, nous offrirons un bon complément à ce que propose déjà la péninsule de Hengchun en matière de loisirs », note Hsu Cheng-lung [許正隆], le directeur adjoint de la Région touristique de la baie de Dapeng, une agence gouvernementale créée en 1997. L'administrateur place tous ses espoirs dans cette large baie située à l'embouchure de deux rivières et qui constitue la plus vaste lagune naturelle de Taiwan. Le littoral étant à cet endroit protégé en partie du ressac par des bancs de sable, la baie de Dapeng est suffisamment calme pour permettre une grande variété de sports nautiques. Elle abrite en outre une faune et une flore aquatiques appréciées des plongeurs.

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La pêche au thon rouge, l'une des principales activités économiques du sud de l'île, est aussi le thème d'un festival qui déplace chaque année des milliers de visiteurs.

La longue histoire de la région n'est pas dénuée d'intérêt. La baie fut utilisée comme base militaire par les Japonais pour leurs hydravions et leurs sous-marins. Elle abrita une école de l'Armée de l'air taiwanaise, qui fut réinstallée ailleurs. La lagune se transforma ensuite en un immense incubateur à huîtres, des ostréiculteurs l'ayant parsemée de parcs qui n'ont été retirés qu'à la fin de l'année dernière, après cinq années de négociations entre les autorités touristiques locales et les éleveurs. « Cette décision a joué un rôle déterminant dans notre travail de développement », dit Hsu Cheng-lung. Cette année, la lagune servira de cadre à un stage de pêche à l'occasion du Festival du thon rouge organisé par le hsien de Pingtung.

Les deux précédentes éditions de ce festival ont connu un succès sans précédent et se sont traduites pour Pingtung par des rentrées d'argent considérables. L'année dernière, environ 800 000 personnes ont participé à l'événement durant lequel le thon, ainsi que les produits agricoles locaux (les fruits tropicaux par exemple) et les sites de la région, ont bénéficié d'une promotion exceptionnelle. D'avril à juin, ces rendez-vous touristiques autour du thon ont ainsi permis de dégager des revenus estimés à 1,5 milliard de TWD. Depuis l'année dernière, le festival de printemps est suivi de trois autres manifestations, une pour chaque saison. « Nous voulons donner à ces activités une envergure économique plus importante, faire en sorte qu'il ne s'agisse pas que de bulles éphémères, explique Su Jia-chyuan [蘇嘉全], le chef du hsien de Pingtung. Pour cela, il faut que les festivals aient un caractère durable, qu'ils correspondent à l'identité de la région et aient un intérêt du point de vue culturel. »

Le festival d'été, qui cible principalement les jeunes, met l'accent sur les jeux folkloriques, ainsi que sur les rallyes et les courses, dans les montagnes environnantes ou sur les rivages, à bicyclette, en scooter ou en jeep. En octobre et en novembre, les autorités locales inviteront des peintres, des sculpteurs, des photographes et des dramaturges d'ici et d'ailleurs à venir créer à Hengchun des œuvres inspirées par l'endroit. Ces œuvres seront envoyées dans les pays d'origine de leurs auteurs dans le cadre de campagnes de promotion touristique à l'étranger, à moins qu'elles n'entrent dans le patrimoine public de Hengchun. « Ces manifestations artistiques ne seront sans doute pas particulièrement lucratives et ne déplaceront peut-être pas les foules, mais à long terme, elles permettront à Hengchun de renforcer son image de marque », note Su Jia-chyuan.

En hiver, lorsque de violentes bourrasques soufflent sur Hengchun depuis les montagnes environnantes, Kenting accueille des carillons à vent. Parmi les quelque 100 000 personnes qui ont participé au festival des carillons en janvier cette année, beaucoup se sont aussi arrêtées à Sihchongsi. Réputée pour ses sources chaudes depuis l'époque japonaise, la ville thermale fait l'objet d'un grand projet de rénovation incluant la construction de voies de communication et de parkings, la restauration des vieilles ruelles, etc. « Vu le succès du festival des carillons de Kenting, c'est normal que la population locale ait envie de créer un événement commercial du même genre, dit Pan Hsu-huang [潘旭煌], le directeur exécutif d'une association locale de développement touristique établie en 2000. Mais peut-être vaudrait-il mieux tout de même commencer par améliorer les infrastructures hôtelières et les installations thermales avant de penser à accueillir des hordes de touristes »

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L'auberge de jeunesse de Kenting, entre mer et montagne. Bien équipée, Kenting est longtemps resté la destination favorite des amateurs de bains de mer.

D'ici à ce que les habitants de Sihchongsi parviennent à transformer leur commune en destination touristique de premier plan, Pan Hsu-huang suggère de se concentrer sur les vacanciers de Kenting et les visiteurs du festival des carillons ou de celui du thon rouge. A terme cependant, il trouve souhaitable de capitaliser sur l'histoire particulière de Sihchongsi. Le plus vieil hôtel des lieux, rappelle-t-il, accueillit un jour le frère de l'empereur du Japon, qui y passa sa lune de miel. Il y a aussi cette stèle érigée en 1874 par les troupes nipponnes pour commémorer le sort malheureux d'un groupe de pêcheurs d'Okinawa : après avoir échappé au naufrage de leur embarcation, une cinquantaine d'entre eux furent massacrés par les aborigènes qui habitaient la région à cette époque-là. [NDLR : La stèle a en fait été dressée à la suite d'une expédition punitive, un contingent de 3 500 soldats japonais ayant été dépêché sur les lieux trois ans après ce premier incident sanglant qui avait été suivi d'autres carnages. Tokyo réclama une lourde compensation financière à la Chine pour avoir « rétabli l'ordre » dans une île qui échappait au contrôle de l'empire chinois, de l'aveu même de ses dirigeants.] « Pour inciter les touristes japonais à choisir les établissements thermaux de Sihchongsi, il faut créer une connexion historique entre le Japon et cet endroit. » L'association de Pan Hsu-huang organise maintenant une cérémonie annuelle pour commémorer l'« Incident du village de Mutan » et prier pour la paix éternelle.

Cet épisode tragique eut pour conséquence indirecte la création d'une colonie de peuplement chinoise à Hengchun. En effet, alarmée par la présence militaire japonaise sur l'île, la cour des Qing encouragea les habitants des régions côtières du sud-est de la Chine à émigrer vers la pointe sud de Taiwan, où une forteresse, appelée Hengchun (printemps éternel) fut construite. Un groupe composé d'historiens, de personnes appartenant au monde des affaires et d'habitants des environs cherche aujourd'hui à préserver et à rénover les vestiges de la forteresse. « Le développement du tourisme doit respecter le passé de la région, dit Lin Chiu-feng [林秋豐], le directeur exécutif d'une association de promotion du tourisme qui met l'accent sur le patrimoine culturel et historique de l'endroit. « Nous voulons faire découvrir aux touristes non seulement les beautés naturelles de Hengchun, mais aussi toutes les traditions qui nous ont été transmises oralement. » Récemment, ce groupe s'est lancé dans le recueil des légendes et des chansons populaires de la région.

Bien que Lin Chiu-feng s'inquiète de la piètre coopération entre les divers niveaux de l'administration locale, il félicite le hsien de Pingtung pour sa créativité. D'autant plus que Su Jia-chyuan, à la tête du hsien , met l'accent sur un aspect capital du développement touristique : les transports. Les travaux en cours incluent l'autoroute no2 entre le centre de Taiwan et la baie de Dapeng, une voie express est-ouest connectant deux grandes autoroutes, et enfin l'aéroport de Hengchun - tous ces chantiers devant s'achever à la fin de cette année. En outre, des compagnies maritimes proposent déjà des liaisons par bateau entre Kaohsiung et Checheng qui seront prolongées jusqu'à Kenting et par la suite jusqu'aux îles très pittoresques que sont Lanyu (l'île des Orchidées) et Ludao (l'île Verte), au large de la côte sud-est.

Ajoutés aux atouts naturels de la région, ces infrastructures permettront à la péninsule de briller de tous ses feux - couchers de soleil en plus. ■

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