03/08/2025

Taiwan Today

Taiwan aujourd'hui

Taiwan en chambres

01/11/2009
Les serveurs de l’hôtel Sheraton, à Taipei. La présence de chaînes hôtelières internationales est un facteur d’amélioration de la qualité du service. (AIMABLE CRéDIT DE L’HÖTEL SHERATON TAIPEI)
Une valise à la main, Hideo Yoshikawa, un architecte d’intérieur japonais, patiente à un passage pour piétons en face de la gare centrale de Taipei et en profite pour demander à un passant le chemin de son hôtel. Bien qu’il passe son temps dans les avions, c’est la première fois qu’il vient à Taiwan. « Je suis impatient de découvrir ma chambre. En fait, je suis obsédé par les chambres d’hôtel, confie-t-il. J’ai même pris l’habitude de faire le croquis de chacune de celles que j’occupe lors de mes déplacements autour du monde. Qu’importe le nombre d’étoiles affichées par l’établissement, l’important pour moi est la sensation de sécurité, de paix et de confort qu’il procure. »

Si tous les voyageurs ne sont pas aussi avertis, le choix de l’hébergement occupe une place centrale dans leurs préparatifs de voyage, et une chambre d’hôtel agréable donne bien souvent le la du séjour. Un sentiment partagé par Lin An-peng [李安朋], le propriétaire d’une petite pension à Taipei dotée seulement de huit chambres. Pour satisfaire sa clientèle, Lin An-peng s’emploie à créer une atmosphère chaleureuse et raffinée. De ce point de vue, il est représentatif des hôteliers insulaires qui s’efforcent d’améliorer le confort et la qualité du service apporté aux visiteurs.

Selon Stanley Yen [嚴長壽], le président de Landis Hotels and Resorts, l’un des principaux groupes hôteliers taiwanais, le développement du secteur hôtelier taiwanais est unique en son genre. Dans son livre The Future that I Foresee, il fait état de trois phases distinctes. A partir des années 50, des hôtels de classe internationale sont construits, non à destination des touristes étrangers, mais pour répondre aux besoins d’hébergement des responsables américains et des membres de la presse internationale de passage dans l’île. C’est à cette époque que le Grand Hôtel et le Club des Amis de la Chine ouvrent leurs portes.

Dans les années 70, des grands groupes internationaux comme Hilton commencent à s’implanter à Taiwan. L’attention qu’ils accordent à la formation du personnel fait faire un bond à la qualité du service. Une armée de professionnels talentueux est ainsi constituée, au bénéfice de toute l’industrie, et d’où émergeront de nombreux directeurs d’hôtels, directeurs de l’hébergement ou de la restauration. Par ailleurs, les stratégies commerciales s’affinent. Les hôteliers comprennent par exemple l’importance d’adapter la présentation des plats chinois aux goûts des visiteurs étrangers. Ils font aussi venir des musiciens étrangers pour égayer les nuits de leurs hôtes.

 

L’hôtel Lalu, dans le district de Nantou, offre des vues imprenables sur le lac du Soleil et de la Lune. L’établissement est membre de Design Hotels, une organisation internationale qui référence les hôtels dotés d’un design innovant. (AIMABLE CRéDIT DE DESIGN HOTELSTM - RéSERVATIONS : www.designhotels.com)

La troisième phase, selon Stanley Yen, est liée au boum économique des années 80 au Japon. Victor Chou [周武], qui après une longue carrière dans l’hôtellerie dirige actuellement le Sherwood Taipei, se rappelle l’afflux de touristes japonais qui a véritablement donné des ailes à l’industrie hôtelière taiwanaise. « Nous n’avions pas assez de chambres disponibles pour les loger », raconte-t-il. Face à cette situation, les gouvernements d’alors ont encouragé les investissements en accordant des prêts à taux réduits et une exonération fiscale totale pendant les cinq années suivant l’ouverture d’un hôtel. Ils ont également permis la construction d’établissements au sein de quartiers résidentiels. La plupart des hôtels de standing de la capitale – Hôtel Royal, Landis, Howard Plaza ou Sheraton – ont bénéficié de ces mesures. Pendant cette période, le service s’est également « nipponisé », explique Wu Chi-mei [吳紀美], maître de conférences au département de Gestion hôtelière de l’Université catholique Fu Jen, à Xinzhuang, dans le district de Taipei. On a ainsi appris aux employés à faire preuve d’une grande humilité, à prêter attention aux détails et à soigner la décoration.

Donner la priorité au client

« Le personnel de service taiwanais a fait sien le principe de “sincérité” et a appris à placer le client au premier rang de ses préoccupations, de manière à satisfaire le moindre de ses besoins. Même si une requête est inhabituelle, tout est mis en œuvre pour y répondre », relate Wu Chi-mei. Le secteur du tourisme a alors semblé promis à une croissance durable. Aux côtés d’hôtels de classe internationale, les hôtels standard et les auberges de jeunesse ont poussé comme des champignons, en ciblant les petits budgets. « En 1997, Taiwan comptait 2 millions de visiteurs. Ils étaient 3,6 millions en 2006. La progression est formidable », estime Victor Chou. 

 

Just Sleep, la nouvelle chaîne lancée par Formosa International Hotels, allie simplicité, confort et praticité avec un style résolument urbain. (AIMABLE CRéDIT DE FORMOSA INTERNATIONAL HOTELS)

Depuis 2006, cependant, les affaires des hôtels de classe internationale stagnent, indique Christina Yeh [葉樹菁], chargée de la planification commerciale au sein du service Hôtellerie et Voyage de l’office national du Tourisme. Entre 2006 et 2008, le nombre des hôtels gérés par un groupe international est resté stable, soit huit établissements en tout et pour tout, précise-t-elle, et même si de nouveaux partenariats commencent à porter leurs fruits, les groupes hôteliers internationaux ont toujours les yeux fixés sur le marché chinois.

Dans son livre, Stanley Yen met en garde contre les conséquences sur le long terme de cette relative désaffection des groupes étrangers. « Sans la présence d’investisseurs internationaux, les établissements locaux restent à l’écart des grandes tendances du marché. »

La crise économique mondiale qui sévit actuellement fait également sentir ses effets. « Malgré la bonne réputation dont jouit notre hôtel et la fidélité de nos clients, de nombreuses activités telles que les conférences ont été annulées en raison des restrictions budgétaires dont ont été victimes nombre de secteurs industriels, comme par exemple celui des technologies de l’information », témoigne Ulf Bremer, le directeur général du Shangri-La au Far Eastern Plaza, à Taipei, et que 22 ans de carrière ont mené d’Allemagne en Asie de l’Est et du Sud-Est, en passant par l’Angleterre et l’Arabie Saoudite, pour des marques aussi prestigieuses que Sheraton, Hyatt ou Shangri-La.

Cherchant la parade, l’office national du Tourisme soutient le secteur hôtelier en misant sur l’augmentation du nombre de touristes, l’amélioration des équipements et la formation du personnel. A son actif, le « Plan de doublement des arrivées touristiques », entre 2004 et 2008, et la campagne « Tour Taiwan », en 2008-2009, qui ont tenté de doper le nombre de visiteurs en identifiant mieux les sites touristiques insulaires à promouvoir et en ciblant certains publics, comme les jeunes par exemple. Par ailleurs, en date du mois de mars 2009, 36 hôtels avaient bénéficié d’un autre programme d’aide à la rénovation du parc hôtelier, indique David Hsieh [謝謂君], le directeur adjoint de l’office national du Tourisme. Ce dernier y voit l’une des raisons de la hausse du taux d’occupation des chambres constatée cette année. Dans les hôtels de classe internationale, il est passé à 70,6%, contre 64,7% en 2008, et il est de 64,4% dans les hôtels standard, en hausse de plus de 3 points par rapport à l’année passée, selon les chiffres de l’office national du Tourisme.

L’ouverture en juillet 2008 du marché insulaire aux Chinois voyageant en groupe a conforté cette embellie. Ainsi, en avril 2009, plus de 131 000 visiteurs en provenance du continent ont foulé le sol de Taiwan.

Le boum des 3 étoiles

Wu Da-wei [武大維], un guide de l’agence de voyages I-Huan, à Taipei, spécialisée dans l’organisation de séjours pour les groupes chinois, explique que, pour des raisons budgétaires, la plupart des agences de voyages du continent demandent que leurs clients soient hébergés dans des hôtels 3 étoiles situés en périphérie des grandes villes. L’impact de l’arrivée des touristes chinois se concentre ainsi sur l’hébergement bon marché, alors que les hôtels 5 étoiles n’en retirent qu’un bénéfice minime, ajoute-t-il.

 

L’hôtel Shangri-La au Far Eastern Plaza, à Taipei, a été le premier dans l’île à obtenir la certification HACCP. (AIMABLE CRéDIT DE L’HÖTEL SHANGRI-LA AU FAR EASTERN PLAZA, à TAIPEI)

Pour Wu Chi-mei, les hôtels taiwanais sont de très bonne qualité mais de grands progrès restent à faire en matière de compétitivité. « Dans l’ensemble, les installations et les stratégies commerciales sont d’un niveau comparable à celui des pays étrangers. La forte concurrence qui règne entre les différents hôtels permet bien souvent de trouver des offres en ligne très attractives, et d’avoir la qualité d’un 4 étoiles au prix d’un 2 étoiles, assure-t-elle, – pour autant que l’on puisse faire confiance aux étoiles affichées par les établissements, en l’absence de toute norme officielle. « Il faut absolument établir un système objectif de classement des hôtels », souligne-t-elle.

« Un système de classification des hôtels a été mis au point l’an dernier par un groupe de travail formé d’universitaires et de professionnels du secteur, note Huang Yu-chen, le directeur des Inspections à l’office national du Tourisme. Nous sommes actuellement à la recherche d’un organisme indépendant pour mener à bien cette évaluation. Dans le même temps, nous essayons de convaincre tous les hôtels, même ceux où le confort est le plus sommaire, de participer à ce classement. Nous encourageons aussi les établissements à s’affilier à des chaînes hôtelières nationales ou internationales, de manière à ce qu’ils s’alignent sur les normes internationales et qu’ils renforcent leur professionnalisme. »

Un programme d’excellence touristique a également été lancé en janvier de cette année. Prévu pour durer quatre an, il vise l’amélioration de la qualité du service : des formations à l’hygiène, à la courtoisie et à la connaissance de la culture taiwanaise sont dispensées au personnel hôtelier. Ce plan veut aussi encourager les propriétaires d’hôtels à obtenir une certification de l’Organisation internationale de normalisation (ISO), à mettre en œuvre la méthode HACCP (système d’analyse des dangers - points critiques pour leur maîtrise), ainsi qu’à mieux préserver l’environnement en sollicitant l’écolabel taiwanais GreenMark.

En 2007, le Shangri-La au Far Eastern Plaza, à Taipei, a été le premier hôtel à Taiwan, et le deuxième au sein du groupe Shangri-La, à obtenir la certification HACCP. L’année suivante, il décrochait la norme ISO 22000 (relative à la sécurité sanitaire des produits alimentaires) et gagnait le Prix de l’hôtel vert de GreenMark. « Avec ces trois certifications, l’hôtel montre sa détermination à fournir le meilleur service à ses clients en garantissant les normes les plus élevées en matière de sécurité sanitaire des aliments et de respect de l’environnement, dit Ulf Bremer. Je pense que nos hôtes peuvent mesurer les efforts que nous avons accomplis. »

Relever les défis

 

Vue sur la tour Taipei 101 depuis le toit de l’hôtel Sheraton, à Taipei. Après une pause de plusieurs années, les groupes hôteliers internationaux s’apprêtent à ouvrir de nouveaux hôtels dans l’île. (AIMABLE CRéDIT DE L’HÖTEL SHERATON TAIPEI)

Autre tendance : certains hôtels de luxe diversifient leur clientèle en investissant dans des concepts différents. Par exemple, le groupe Formosa International Hotels, qui gère le Grand Formosa Regent, à Taipei, a dévoilé cet été sa nouvelle chaîne d’hôtels : Just Sleep. Le premier établissement de ce type vient d’ouvrir ses portes dans le quartier de Ximenting, à Taipei. « L’idée de Just Sleep est d’offrir aux voyageurs d’affaires des chambres confortables, parfaitement équipées et bien situées, le tout à un prix modique. Just Sleep fournit l’essentiel (“un lit, un bain et un petit déjeuner”, promet notre slogan) en mettant en avant ses atouts (“petit, stylé et futé”), et ce pour moins de 3 000 dollars taiwanais la nuit », explique Amy Hsueh [薛雅萍], la directrice générale du Grand Formosa Regent. « Les cinq à dix prochaines années seront décisives pour le développement touristique de l’île, ajoute-t-elle. Nous espérons que le gouvernement assouplira la réglementation et autorisera les séjours individuels de touristes chinois. Cela aura un impact majeur sur l’activité des hôtels 5 étoiles. »

L’augmentation du nombre de visiteurs chinois est un bon test de la capacité d’adaptation du secteur hôtelier. « Nous pouvons profiter de cette situation pour procéder à des améliorations longtemps différées, note Chang Xue-lao [張學勞], le président de l’Association des visiteurs de Taiwan. Sur le long terme, cependant, nous ne devrions pas négliger les touristes japonais, coréens, singapouriens ni même européens et américains. Notre hôtellerie gagnerait beaucoup à internationaliser sa clientèle. »

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