12/05/2025

Taiwan Today

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HTC, l’intelligence du téléphone

01/04/2010
En charge du marketing à HTC, John Wang estime que l’entreprise taiwanaise a su anticiper la révolution de l’Internet sans fil, ce qui explique ses succès actuels.
L’année 2009 n’aura pas été de tout repos pour HTC, le premier fabricant taiwanais de smartphones. Au début du mois d’août, la société perdait ici son titre de « reine des marchés » au profit de Mediatek, ce dernier ayant été le premier à tirer partie de l’engouement des consommateurs chinois pour ces nouveaux terminaux multimédias. Cependant, grâce aux ventes réalisées sous sa propre marque en Europe, HTC a finalement affiché de meilleurs résultats que son concurrent taiwanais. Il faut dire que HTC possède un atout de taille : il fabrique des téléphones tactiles intégrant les plates-formes Windows Mobile de Microsoft, d’une part, et Androïd de Google, d’autre part.

Il semble bien loin le temps des premiers téléphones portables. Apparus il y a de cela 26 ans, ceux-ci ressemblaient à de grosses briques et ne savaient rien faire d’autre que téléphoner. Avec l’arrivée de l’Internet sans fil, les portables ont rapidement évolué. Aujourd’hui, les détenteurs de smartphones peuvent – du bout du doigt – prendre des photos, écouter de la musique, jouer, envoyer et recevoir des e-mails, travailler sur des documents, profiter d’une connexion à l’Internet haut débit et même de la navigation par satellite !

HTC s’est d’abord fait un nom dans la production en sous-traitance d’assistants numériques personnels (PDA) et a développé sa propre marque de smartphones il y a seulement quatre ans. En 2008, sa production dépassait 12 millions d’unités et il conquérait 7,5% du marché mondial, devenant par la même occasion le numéro un taiwanais du secteur. En 2009, la marque valait 38,9 milliards de dollars taiwanais, ce qui la plaçait au quatrième rang insulaire.

Touch contre iPhone

Il y a 13 ans, la petite usine de HTC sortait de terre au milieu des rizières de Guishan, dans le district de Taoyuan. Ses trois fondateurs n’étaient pas des débutants – ils avaient travaillé ensemble pour la société américaine Digital et détenaient un savoir-faire indéniable – mais ont été pourtant à deux doigts de faire faillite, faute de clients. Les autres investisseurs se retirant, seule Cher Wang [王雪紅], la fille du fondateur de Formosa Plastics, Wang Yung-ching [王永慶], est restée dans la course. Elle préside aujourd’hui la société.

C’est sous son impulsion que HTC s’est lancé dans la fabrication d’ordinateurs de poche avec Microsoft, avant de devenir le premier sous-traitant mondial pour la production de PDA. En 2005, le magazine américain Business Week faisait figurer Cher Wang parmi les 25 stars des affaires les plus clairvoyantes en Asie.

Les deux autres fondateurs, Cho Huo-tu [卓火土], plus connu sous le nom de H.T. Cho, et Peter Chou [周永明], ont su miser sur l’avènement de l’Internet sans fil et surfer sur la réputation de Microsoft pour ouvrir à HTC la route des smartphones.

En 2007 est sorti le HTC Touch, un premier modèle doté d’un écran entièrement tactile, et qui s’est vendu en moins de 6 mois à plus d’un million d’exemplaires. Le Touch Diamond et le T-Mobile G1 – le premier téléphone cellulaire à utiliser la plate-forme Androïd – ont suivi. Les deux ont figuré parmi les 10 meilleures ventes mondiales, un résultat qui a laissé plus d’un concurrent pantois.

Le HTC Touch utilisait l’interface Touch FLO, une technologie brevetée permettant aux utilisateurs de naviguer entre les applications en déplaçant leur doigt sur l’écran – et donc sans besoin d’un stylet. La sensibilité de l’écran était si grande qu’on disait l’appareil capable de distinguer un doigt de femme d’un doigt d’homme, se souvient John Wang [王景弘], responsable du marketing à HTC. Mais juste avant la sortie du HTC Touch, Apple annonçait celle de l’iPhone, doté d’un écran tactile similaire, d’un meilleur design et de fonctionnalités plus attractives.

Si les projecteurs des médias se sont alors naturellement braqués sur l’iPhone, le HTC Touch a néanmoins remporté un franc succès aux Etats-Unis et en Europe, et permis à la marque de s’y faire connaître.

Conçu pour l’utilisateur

« Les fonctions des mobiles devenaient de plus en plus compliquées, et les utilisateurs s’y perdaient. Nous n’avons jamais eu qu’un seul but : concevoir un téléphone cellulaire d’une facilité d’utilisation inédite, confie John Wang, lequel est également à la tête du Magic Labs, la division de recherche et développement de la firme. Au départ, HTC a donc cherché à réarranger les menus et à réduire les niveaux de choix, ou encore à modifier les icônes présentes à l’écran ainsi que le design de l’appareil. Rapidement, cependant, il est devenu évident qu’il fallait repartir de zéro et concevoir un téléphone que même un enfant en bas âge ou une grand-mère pourraient utiliser. « La solution la plus naturelle était d’utiliser une interface opérable d’une simple pression du doigt. »

Le prix des smartphones étant près de cinq fois supérieur à celui des téléphones portables ordinaires, la plupart des ventes s’effectuent via des coopérations entre les constructeurs et les opérateurs téléphoniques. Dans ce contexte, la réactivité est essentielle, et HTC, qui fabrique des téléphones pour sa propre marque mais également en sous-traitance, ne manque pas d’atouts dans ce domaine. La société ne correspond pas à l’image que l’on se fait parfois du sous-traitant taiwanais suiviste, exécutant passivement les demandes des clients, et expert en rétro-ingénierie. Au contraire, à peine a-t-il vent de nouvelles applications pour mobiles que le Magic Labs charge un groupe de travail d’en tirer immédiatement une innovation à proposer aux clients. Par exemple, l’idée d’ajouter au Blackberry, le smartphone conçu par le Canadien RIM, une fonction permettant de lire, recevoir ou envoyer 10 e-mails à la fois avait été soufflée à RIM par HTC.

De manière à garder une longueur d’avance sur la concurrence, HTC ne dévoile aux clients pour lesquels elle produit en sous-traitance ses nouveaux modèles que quatre mois avant leur sortie des chaînes de production. C’est à ce moment seulement que sont décidés la couleur des appareils ou l’emplacement du logo. Cette méthode de travail témoigne de la confiance accordée par ses clients à l’entreprise.

Une marque doit réussir toute une série d’épreuves avant que les consommateurs ne lui fassent confiance, estime Peter Chou (à d.), le Pdg de HTC, ici en compagnie de Steve Ballmer, le Pdg de Microsoft.

Le gène de la créativité

A quoi ressembleront les prochains smartphones ? « La communication mobile évolue constamment et nous devons rester très réactifs. A de nombreux égards, y compris du point de vue des objectifs opérationnels et des modes opératoires, cette année sera pour nous très différente de l’année passée », explique John Wang.

HTC n’a pas hésité à braver la norme en optant pour Microsoft alors que tous ses concurrents misaient sur le système d’exploitation Palm. Aujourd’hui, HTC reste l’un des principaux fabricants de smartphones fonctionnant sur Windows Mobile. Afin de développer sa propre marque, l’entreprise n’a pas non plus reculé devant l’acquisition de Dopod, pour qui elle fabriquait en sous-traitance. A Touch FLO, breveté en 2007, ses ingénieurs ont ajouté la 3D pour la sortie du Touch Diamond en 2008, un terminal haut débit doté d’un GPS et utilisant Google Maps. Puis, ce fut le tour du premier smartphone fonctionnant sur Androïd, suivi, en 2009, du HTC Hero avec sa nouvelle interface Sense, permettant une personnalisation accrue.

« Beaucoup d’entreprises ont le mot “innovation” à la bouche mais elle sont technologiquement limitées et ne peuvent apporter à leurs produits que des améliorations mineures. Pour notre part, nous ne nous satisfaisons jamais du statu quo, affirme John Wang. Avant même de posséder notre propre marque, nous comptions déjà des fans ! » Selon lui, de nombreux consommateurs, sachant que HTC fabriquait les mobiles distribués par les opérateurs téléphoniques Orange ou T-Mobile, guettaient en ligne l’apparition des dernières nouveautés de la maison taiwanaise et en faisaient la demande expresse à leur opérateur téléphonique. Ainsi, dès la sortie du HTC Touch, Orange et T-Mobile ont misé sur ce produit et l’ont promu dans leurs boutiques.

Porte-étendard

A ceux qui n’ont que les parts de marché en tête, HTC oppose ses valeurs fondamentales. « Notre slogan est “quietly brilliant”. Nos collaborateurs prêtent énormément attention aux détails », insiste John Wang. Un nouveau modèle après l’autre, le rêve de globalisation de HTC prend corps peu à peu, renforçant par la même occasion ses ambitions.

« Nous ne voulons pas seulement que notre marque soit connue partout : notre ambition est de devenir une marque globale, une marque qui puisse représenter Taiwan. » L’objectif est clair : être non pas une marque parmi d’autres, mais, à l’image de BMW dans le secteur automobile, être la marque de référence. Pour l’atteindre, HTC doit encore surmonter de nombreux obstacles. La raison pour laquelle HTC a connu une croissance si rapide, soulignent les analystes, est que l’entreprise s’est lancée à la conquête d’un territoire vierge. Mais toutes les entreprises de télécommunications se disputent désormais les parts de ce juteux marché, non seulement les leaders du secteur, comme Nokia, Apple et RIM, mais aussi les Coréens Samsung et LG, ainsi que les Taiwanais Acer et Mediatek. Dans ce contexte, la rentabilité de HTC sera-t-elle assurée ?

John Wang est peu disert à ce sujet et préfère s’en remettre au professionnalisme de la compagnie, à son sens de l’innovation et du travail bien fait pour que les terminaux signés HTC deviennent le rêve de tout consommateur.

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