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Blue Gate Crossing : les films taiwanais aussi ont une audience

01/02/2003
Fin 2002, Blue Gate Crossing a caracolé en tête du box-office local.
En regardant les films à l'affiche ici, il est difficile de ne pas se rendre compte de la domination de l'industrie du cinéma de Hollywood. De temps à autre, un long-métrage insulaire est projeté dans une ou deux salles, au mieux, et pour un temps très court. Beaucoup se lamentent que le cinéma local est devenu trop ennuyeux et que le public tend à le fuir. Pourtant le succès commercial de Blue Gate Crossing va contre la tendance.

Ce film taiwanais est non seulement parvenu à s'assurer un public dans l'île - en majorité des élèves du secondaire -, mais il a aussi su sortir du lot des médiocres productions commerciales. « Cette œuvre est pure, simple et touchante », a écrit un critique.

Depuis ses débuts dans les salles le 27 septembre jusqu'en novembre, Blue Gate Crossing a caracolé en tête du box-office local, réalisant en moins de deux mois 150 000 EUR de recettes, ce qui représente le sixième des revenus de l'ensemble des productions locales dans la région de Taipei.

« Je suis heureux de voir que le film a été projeté lors de la Quinzaine des réalisateurs du 55e Festival de Cannes mais aussi qu'il ramène dans les salles de l'île un public taiwanais jeune », s'exclame le réalisateur Yee Chih-yen [易智言].

Blue Gate Crossing est son second film, après un passage à vide de six ans. L'adolescence demeure le sujet favori du cinéaste. Les jeunes sont pleins d'énergie et prêts à prendre des risques, affirme-t-il : « Voilà des éléments qui rendent un film attirant ! »

Contrairement à la nouvelle vague de réalisateurs des années 80 ou du début des années 90, au talent unique pour dresser des portraits émouvants ou traiter de la jeunesse en quête d'identité ou en rébellion contre la société, Yee Chih-yen met en lumière les adolescents et leurs problèmes au quotidien. « Il est faux de penser que mes œuvres reflètent une nostalgie de la jeunesse, assure-t-il en tirant sur une cigarette. La vérité est que je tourne des films pour être compris des jeunes, pour partager avec eux. »

Blue Gate Crossing : les films taiwanais aussi ont une audience

Yee Chih-yen : « Je tourne des films pour être compris des jeunes, pour partager avec eux. »

Les 15-20 ans sont particulièrement concernés par la trame d'un film basé sur les amours de jeunesse, pleines de passion mais aussi d'interrogations. « Les flirts jouent un rôle important dans la vie des lycéens. Lorsqu'une relation s'arrête, les adolescents ressentent l'amertume de l'âge adulte. C'est une sorte de prélude à la maturité, explique Yee Chih-yen. Alors qu'il s'agit d'une histoire douce-amère, la candeur des personnages principaux rappelle les souvenirs, pour un public plus âgé, d'une simplicité évanescente et de la naïveté du passé. »

Si les films taiwanais ont été remarqués lors de festivals internationaux ces dernières années, leur popularité parmi les spectateurs insulaires n'a cessé de décroître. A la fin des années 80, près de 200 films étaient produits localement bon an mal an. Aujourd'hui, on en compte une vingtaine.

L'industrie locale du cinéma a souffert de sa rivalité avec Hollywood et ses productions à gros budgets. Il semble difficile de ramener à la vie cette industrie, même si Yee Chih-yen se veut optimiste, puisqu'il constate que de plus en plus d'affiches annoncent la sortie de productions locales, que le public est d'ailleurs davantage enclin à aller voir.

Le réalisateur de Blue Gate Crossing est conscient que l'avenir de l'industrie cinématographique locale n'est pas rose, surtout depuis l'entrée à l'Organisation mondiale du commerce, Taiwan s'étant engagée à lever les quotas sur les importations de productions étrangères. Il est donc temps, pour les pouvoirs publics, d'intervenir en aidant l'industrie à trouver de nouvelles sources de financement.

De plus en plus, les créateurs se tournent vers les audiences internationales ou la coproduction avec des studios étrangers. Cela a été le cas pour Blue Gate Crossing, co-financé par la société française Pyramide Productions.

Les films locaux sont-ils aujourd'hui trop souvent hors de portée du grand public ? Sans pour autant sacrifier au mauvais goût, il est possible de faire des films accessibles à tous, répond Yee Chih-yen pour qui, sans succès commerciaux, il sera difficile de songer à revitaliser une industrie bien mal en point. ■

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