07/06/2025

Taiwan Today

Taiwan aujourd'hui

Deng Nanguang, témoin de son temps

01/03/2011
Dans la ville de Ruifang. 1960.
Peu de Taiwanais ont dans l’idée que, dans la première moitié du 20e s., Taipei fut, dans bien des domaines, de l’architecture à la musique, en passant par la photographie ou la peinture, en phase avec son temps, qu’on y vivait à la même heure que les modernistes de Tokyo et de Shanghai.

Dans le Taipei des années 30, des Taiwanaises à la coupe au carré qui n’auraient pas détonné dans le boudoir de Zelda Fitzgerald fumaient des cigarettes dans les bars en écoutant du jazz, tandis que, au dehors, des bourgeoises en kimono couraient doucement sur leurs socques en bois.

Né à Taiwan mais formé au Japon, Deng Nanguang [鄧南光] (1907-1971) promenait sur ce délicieux petit monde un regard complaisant. Il s’était exercé à Tokyo, entre 1929 et 1935, fixant sur la pellicule surtout des femmes. De retour à Taipei, il ouvrit un studio, qui ne désemplissait pas de belles dames, et il travailla aussi dans la publicité. Mais il serait dommage de le cantonner à ce rôle de photographe de salon romantique, lui qui, avec Chang Tsai [張才] et Lee Ming-tiao [李鳴鵰], forma à partir de la fin des années 40 une fine équipe connue sous le nom des « Trois Mousquetaires » de la photo. Surtout, il fit beaucoup pour le développement de la pratique à Taiwan.

Car il sut aussi saisir avec poésie et art la campagne taiwanaise et les scènes de rue, des funérailles aux mariages, mais aussi l’envers du décor – les quartiers miteux de la capitale, jusque dans ses ruelles les moins recommandables, où traînaient des fillettes aux pieds nus. D’une réelle qualité esthétique, ces fragments d’histoire longtemps restés enfouis – ils furent redécouverts à la fin des années 80 chez son fils Deng Shiguang [鄧世光] – ont une force documentaire exceptionnelle. On y retrouve un Taiwan disparu, certes, mais dont l’âme affleure toujours ici et là. Dans ces clichés, la plupart extraits d’une rétrospective qui lui a été consacrée par le Musée des beaux-arts de Taipei en 2007, Deng Nanguang nous parle de son île avec une tendresse évidente. On y capte tout de suite un sens aigu de la composition qui, dans une courbe de rue, une structure métallique, un échafaudage de bambous, n’est pas sans rappeler les grands noms français de la photographie.

De son vivant, Deng Nanguang n’a pas eu la célébrité de ses compères. Il avait pourtant lui aussi du panache. Il n’est pas trop tard pour redécouvrir son œuvre.

 

Femme aveugle, Jiufen. Années 1960.


 

Vêtements séchant au soleil – Banlieue de Taipei. 1960.


 

Pont de Taipei. Années 1950.


 

Plaine de Guandu – Eleveur de canards. Années 1960.


 

Temple Citian, Beipu. 1950


 

Mineur à Nuannuan. Ca.1955.


 

Passants sur la digue. 1940-45


 

Village aborigène de Chaozhou, Pingtung. 1943.

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