05/05/2024

Taiwan Today

Accueil

Energies renouvelables : à toute vapeur

22/04/2017
De la vapeur s’écoule d’une canalisation sur le site en construction de la centrale géothermique de Qingshui, dans le district d’Yilan, dans le nord-est de Taiwan.
Huang Chung-hsin / Taiwan Review
Taiwan commence à exploiter ses ressources géothermiques, la biomasse et les courants marins pour rendre sa production d’électricité plus durable.
 
Depuis des décennies, on se rend dans le district d’Yilan, dans le nord-est de Taiwan, pour se plonger dans ses nombreuses sources chaudes. Désormais, le district cherche également à utiliser cette abondante ressource géothermique à d’autres fins – alimenter un avenir durable.
 
En août 2016, le district d’Yilan a dévoilé un plan sur trois ans visant à doubler sa capacité de production d’énergie renouvelable, en la portant à 80 mégawatts (MW). Alors que la capacité de 40 MW déjà installée provient de deux centrales hydroélectriques et d’une usine d’incinération des ordures ménagères, l’essentiel de l’énergie nouvellement produite proviendra de projets solaires et géothermiques. « Notre but ultime est de faire de Yilan un district des énergies vertes entièrement alimenté par des sources renouvelables », dit Kang Li-ho [康立和], le directeur par intérim du Bureau de protection environnementale du district.
 
Sous l’impulsion de la présidente de la République, Tsai Ing-wen [蔡英文], le gouvernement a fixé l’objectif de faire passer la part de l’électricité produite à partir de sources renouvelables de 4% actuellement à 20% d’ici 2025. La géothermie occupe une place modeste mais significative dans cette transition, le Bureau de l’énergie du ministère de l’Economie prévoyant d’ajouter au bouquet énergétique taiwanais 150 MW de capacités géothermiques en quatre ans.
 
Le grand nombre de sources chaudes trouvées dans les environs d’Yilan suggère que cette région est dotée du meilleur potentiel dans ce domaine à Taiwan. Des projets sont déjà en cours pour construire quatre centrales géothermiques dans le district, avec une capacité globale de quelque 20 MW. « La géothermie est une source stable et continue d’électricité », souligne Kang Li-ho.
 
Potentiel inexploité
Sur les quatre centrales géothermiques prévues dans le district d’Yilan, celle de Qingshui est la plus avancée. Conçue par l’Institut de recherche sur les technologies industrielles (ITRI), un organisme parapublic installé à Hsinchu, et maintenant gérée par une filiale de la compagnie nationale d’électricité Taiwan Power, elle devrait devenir en 2020 la première à être mise en service à Taiwan.
 
Les travaux ont également commencé sur un autre site situé vers Hongchailin et financé par le ministère des Sciences et Technologies. Ce dernier a sous-traité à l’unité de prospection pétrolière de CPC Corporation, la compagnie pétrolière publique, le percement d’un puits de 3 km de profondeur. Sur place, la percée dépasse déjà 2 km.
 
Concernant les deux autres centrales, le travail de planification est pratiquement achevé. L’une est un projet mené par le Bureau de l’énergie et l’Office des forêts, lequel dépend du ministère de l’Agriculture, près de la station de sources chaudes de Renze, alors que l’autre est l’affaire de l’entreprise Lanyang Geothermal Corp., dans la région de Lize.
 
Selon Kao Cheng-yan [高成炎], le fondateur de Lanyang Geothermal, Taiwan possède tout le savoir-faire technique pour atteindre ses objectifs en matière de géothermie. En particulier, il croit que l’expertise de CPC dans le domaine du forage facilitera le développement rapide du secteur, et note que l’entreprise a l’expérience de forages à des profondeurs de 5 km.
 
Professeur de l’Université nationale de Taiwan aujourd’hui à la retraite et militant antinucléaire de longue date, Kao Cheng-yan explique que son entreprise a l’intention d’utiliser une technologie expérimentale offrant une meilleure protection de l’environnement que les approches traditionnelles. Appelée « Extraction complexe de l’énergie à partir de sources géothermiques » (CEEG selon l’acronyme anglais), cette technique crée un système qui se passe de l’eau souterraine pour produire de l’énergie et minimise l’impact sur la structure des sols. Lanyang Geothermal coopère également avec une entreprise japonaise installée à Kuyshu pour développer des turbines à vapeur spécialement conçues pour la génération d’énergie géothermique.
 
En juillet 2016, un essai de turbine propulsée par le courant marin a été realize au large des côtes du district de Pingtung, à la pointe sud de Taiwan.
Aimable crédit de l’Université nationale Sun Yat-sen

De l’énergie avec les déchets
Les programmes de développement énergétique du district d’Yilan vont au-delà du solaire et de la géothermie. Une petite partie (2,2 MW environ) des 40 MW supplémentaires attendus doit en effet provenir de sources telles que le biogaz et l’hydroélectrique.
 
Le district est en train de construire à Zhuangwei un centre pour la ressource en déchets organiques qui sera capable de traiter chaque jour 200 t de déchets – principalement des fumiers et lisiers. Cet équipement devrait disposer d’une capacité de production de 400 kilowatts (kW).
 
Ces dernières années, la production de biogaz s’est accélérée à Taiwan, en grande partie grâce aux efforts de l’entreprise publique Taiwan Suger (Taisugar). Membre actif de l’Association de Taiwan pour le secteur de la biomasse énergie, dont le siège est à Taipei, Taisugar gère les plus grands élevages porcins de Taiwan, avec 19 sites produisant environ 380 000 porcs par an.
 
A ce jour, le groupe agroalimentaire a installé des générateurs de biogaz dans quatre de ses porcheries du district de Pingtung, dans le sud de Taiwan. Toutefois, si ces installations produisent de l’électricité, leur objet premier est de protéger l’environnement en dégradant le méthane.
 
A la fin de l’année 2016, l’entreprise a dévoilé son intention d’implanter dans davantage d’élevages des générateurs dernier cri pouvant produire sensiblement plus d’énergie. A la ferme de Donghaifong, à Changzhi, dans le district de Pingtung, par exemple, un investissement de 688 millions de dollars taiwanais est prévu pour l’installation de technologies européennes de production de biogaz permettant de collecter le lisier produit par 30 000 porcs, ainsi que les excréments de poulets, de canards et d’autres animaux de 24 autres élevages privés de la région, en vue de la production d’électricité.
 
Cet équipement qui devrait entrer en service en 2018 aura une capacité de production d’environ 200 kW et pourra servir de modèle à d’autres entreprises pour le développement de l’économie circulaire. Taiwan produit à l’heure actuelle un total de 740 MW d’électricité à partie de biogaz et de la biomasse, indique le Bureau de l’énergie au ministère de l’Economie. Selon ce dernier, cette production devrait atteindre 768 MW en 2020.
 
Energie marine
Etat insulaire disposant de surfaces terrestres limitées, Taiwan cherche aussi à tirer parti de l’énergie marine le long de ses côtes. Le ministère des Sciences et Technologies a subventionné un projet mené par des scientifiques locaux pour évaluer la possibilité d’exploiter les courants marins, une approche encore expérimentale.
 
Taiwan est bien placé pour exploiter cette ressource renouvelable. Le courant du Kuroshio (« courant noir » en japonais) parcourt l’ouest du Pacifique nord depuis l’île de Luçon, aux Philippines, en passant au large de Taiwan et du Japon, pour rejoindre le courant du Pacifique nord. Après avoir effleuré la péninsule de Hengchun, à la pointe sud de Taiwan, le Kuroshio passe le long de la côte orientale sur un tracé de plus de 100 km de large et à une vitesse de 1,5 mètre par seconde.
 
« L’océan pourrait s’avérer une meilleure source d’énergie que la géothermie, dit Chen Yang-yih [陳陽益], professeur au département d’Environnement et de Génie marin de l’Université nationale Sun Yat-sen, à Kaohsiung. Grâce au Kuroshio qui coule si près de ses côtes, Taiwan est l’un des meilleurs endroits au monde pour ces projets d’exploitation des courants marins. »
 
A la tête d’une équipe de recherche soutenue par le ministère des Sciences et Technologies et composée d’experts venus des universités, d’instituts de recherche publics et d’entreprises spécialisées dans la construction maritime et la fabrication des turbines. Un premier test a déjà obtenu des résultats significatifs.
 
Le 25 juillet 2016, l’équipe de Chen Yang-yih a installé au large de la côte sud-est de Hengchun un groupe turbine-alternateur de 50 kW. La turbine était placée à environ 30 m de profondeur et connectée à une base placée sur le fond marin 900 m plus bas. Propulsé par des courants allant à 1,27 m par seconde, l’unité a fonctionné avec succès pendant la durée du test, soit une soixantaine d’heures.
 
Selon Chen Yang-yih, les courants marins sont plus fiables que les autres options océaniques telles que l’énergie marémotrice. « Les récentes avancées ont aussi permis de répondre à des inquiétudes majeures évoquées face à cette technologie, comme la tolérance de l’équipement au sel et sa compatibilité avec la vie marine. »
 
Confortée par ce premier succès, l’équipe de Chen Yang-yih prépare des tests additionnels. Son objectif ultime est d’installer la première centrale marine taiwanaise au large des côtes de Hengchun d’ici 2020. Le ministère espère que ce projet aidera le gouvernement à remplir son objectif de fermer d’ici à 2025 les trois centrales nucléaires aujourd’hui en activité, et dont l’une est justement située dans la péninsule de Hengchun.
 
« Les habitants de la région sont très favorables à ce projet, assure le professeur. Il pourrait créer de nombreux emplois et permettre un démantèlement anticipé de la centrale nucléaire. »

Les plus lus

Les plus récents