L’Association des Français de Taiwan et l’Alliance française de Taiwan organisent demain, vendredi 29 mars, à Taipei une
conférence consacrée aux questions de traduction et d’identités linguistiques dans le cinéma sinophone. Animée par Henry Leperlier, professeur titulaire au Dublin Institute of Technology, en Irlande, elle se propose de démontrer pourquoi il ne faut pas toujours faire confiance aux sous-titres et au doublage.
C’est à travers l’analyse de trois films se déroulant dans des univers multilingues –
Kekexili, la patrouille sauvage du réalisateur chinois Lu Chuan [陸川] et dont l’intrigue se passe au Tibet,
Breaking News du Hongkongais Johnnie To [杜琪峰] et
La cité des douleurs du Taiwanais Hou Hsiao-hsien [侯孝賢] – qu’Henry Leperlier entend souligner l’importance de respecter et de transmettre les différences culturelles.
« Le choix de langues dans un film est loin d’être dû au hasard, note l’universitaire dans le texte de présentation de la conférence. Il s’agit de décisions conscientes voulues par le metteur en scène. Dans les deux premiers films, le passage d’une langue à l’autre – du tibétain au mandarin et du cantonnais au mandarin et à l’anglais, respectivement – accentue l’existence de « l’autre » avec qui il faut négocier, dialoguer et partager un espace. Dans
La cité des douleurs, les langues donnent une troisième dimension à l’univers complexe, colonial, post-colonial et aux invasions avec lesquelles les Taiwanais ont dû négocier pour survivre et conserver leur identité et leurs mémoires. »
Ces films, poursuit-il, sont aussi le reflet d’une identité chinoise fracturée. « Cette diversité culturelle et linguistique est presque totalement absente dans les sous-titres de ces films très connus. Ces identités gommées dans les sous-titres et le doublage ont pour résultat un produit culturel relativement aseptisé et simplifié à l’extrême, laissant la voie ouverte à toutes sortes d’orientalismes. A une époque où même des sinophones érudits regardent ces films à l’aide de sous-titres, la responsabilité des producteurs et des réalisateurs est devenue cruciale pour le dialogue inter-culturel. »
La conférence, gratuite, se tiendra en français et sera traduite en chinois simultanément. Elle débutera à 19h dans les locaux de l’Alliance française de Taipei.