Culture
Mourad Merzouki, chorégraphe bondissant, de retour à Taiwan
03/09/2013
Le chorégraphe français Mourad Merzouki vient de passer une semaine dans les montagnes de Taiwan, à la rencontre de la culture aborigène. Il venait y puiser ce qui sera peut-être la trame d’un nouveau spectacle qui devrait être monté à l’automne 2016.
« C’est encore une fois sur l’invitation de Madame Tchen Yu-chiou [陳郁秀] que je suis revenu à Taiwan », a-t-il confié à Taiwan Info hier.
L’ancienne ministre de la Culture et ancienne présidente du Centre culturel Chiang Kai-shek était en effet déjà à l’origine de sa collaboration inattendue avec le styliste taiwanais Johan Ku [古又文] qui a abouti en mars 2012 au scintillant Yo Gee Ti. Et il lui reconnaît une qualité exceptionnelle, celle de savoir « provoquer la création ».
Cette fois-ci, poursuit le chorégraphe qui était accompagné pour ce séjour de son photographe et complice de longue date, Michel Cavalca, Tchen Yu-chiou l’a orienté sur la culture aborigène.
Malgré une première impression d’uniformité teintée de folklorisme, raconte-t-il, certaines rencontres ont été très riches d’émotion. « J’ai finalement fait la connaissance d’artistes contemporains qui ne s’enferment pas dans leurs racines. Ces rencontres sont un peu comme une porte d’entrée, elles débouchent sur un questionnement qui est très nourrissant pour un artiste. »
Paradoxalement, semble-t-il dire, c’est en partant à la recherche de l’autre dans toute son étrangeté – en l’occurrence, le Taiwanais d’origine aborigène en quête de son identité – qu’il parvient à faire lui-même un voyage intérieur de retour à ses racines.
Ainsi du sculpteur atayal Rahic Talif qui utilise par exemple dans ses installations des tongs en plastique récupérées sur les plages pour parler des maux qui affectent les sociétés austronésiennes.
Il relate aussi des échanges passionnants sur la transmission du savoir, des traditions, avec Yuma Taru, qui a été la costumière de la grande fresque guerrière Seediq Bale, dans laquelle le réalisateur Wei Te-sheng [魏德聖] raconte le soulèvement de la tribu Seediq contre l’occupant japonais, au début des années 30. Celle qui a passé dix ans à retrouver les techniques de tissage disparues se pose une question qui trouve chez Mourad Merzouki une résonnance particulière : que faire des traditions ?
Pour le chorégraphe, le défi est bien celui-là. Comment extraire des traditions un fil conducteur pour l’œuvre contemporaine promise, comment moderniser sans trahir ? Déjà, une certitude : « Il faut sortir du costume, faire évoluer la scénographie, partir d’un détail graphique par exemple ».
Mourad Merzouki a donc du grain à moudre. Rendez-vous dans trois ans, pour une nouvelle incursion dans l’univers scénographique très personnel du chorégraphe – sons et couleurs aborigènes en plus.