Taiwan Today

C’est un Chen Shui-bian très en verve qui a comparu hier devant le Tribunal de Taipei en audience préliminaire. Prenant la parole pendant une heure et demie, l’ancien président de la République a rejeté les charges de corruption, détournement de fonds, blanchiment d’argent, faux et usage de faux pesant contre lui. Il a par ailleurs mis en cause l’intégrité et l’impartialité des procureurs et des juges, attaquant au passage plusieurs personnalités politiques. « Je ne suis pas coupable car je n’ai commis aucun crime, a déclaré Chen Shui-bian. Aujourd’hui, mon sort est entre vos mains, mais au tribunal de l’Histoire, les procureurs, ainsi que le collège de juges en charge de l’affaire et son président, seront certainement jugés à leur tour ». Chen Shui-bian a accusé Chu Chao-liang, l’un des procureurs de la Cellule spéciale d’investigation, d’avoir étouffé des preuves du versement par Pékin de 200 à 300 millions de dollars taiwanais à l’ancien président de la République Lee Teng-hui. Chu Chao-liang a plus tard rappelé que ces accusations de corruption émanaient de Chen Shui-bian lui-même et qu’elles faisaient actuellement l’objet d’investigations. Ce dernier s’en est ensuite pris à Wu Wen-chung, un autre procureur, lui reprochant d’avoir empêché une amie, Chang Wei-tsin, de transmettre à Frank Hsieh, l’ancien candidat du Parti démocrate-progressiste à l’élection présidentielle de 2008, un DVD compromettant pour son concurrent Ma Ying-jeou. D’après Chen Shui-bian, il s’agirait d’un enregistrement prouvant l’existence de relations intimes entre Ma Ying-jeou et l’ex-époux de Chang Wei-tsin, l’Américain Charles Mack, un ancien animateur radio. Un troisième procureur, Yueh Fang-ju, aurait, selon Chen Shui-bian, demandé à la présidente du Parti démocrate-progressiste, Tsai Ing-wen, d’intercéder auprès de lui, alors qu’il était encore en fonction en avril 2008, pour obtenir la grâce de Yu Wen, un ancien collaborateur de Ma Ying-jeou à la mairie de Taipei, condamné à un an de prison pour détournement de fonds. Chen Yun-nan, le porte-parole de la Cellule spéciale d’investigation, a démenti toute ingérence de Yueh Fang-ju dans ce dossier, ajoutant : « Tout comme ses allégations au sujet de Wu Wen-chung, cela n’a rien à voir avec les affaires pour laquelle l’ancien chef de l’Etat est jugé ». Les juges ont par ailleurs rejeté les demandes des avocats de Chen Shui-bian de dépayser le procès et de remettre immédiatement en liberté leur client, qui reste donc en détention provisoire. L’audience préliminaire doit se poursuivre jusqu’à demain. Interrogé après la fin de l’audience, Lin Chih-jia, le secrétaire-général de l’Union solidarité Taiwan, proche de l’ancien président Lee Teng-hui, n’a pas souhaité réagir aux accusations de Chen Shui-bian. La Présidence de la République s’est également refusée à tout commentaire.