29/04/2024

Taiwan Today

Politique

Discours d'investiture du président Ma Ying-jeou

21/05/2012
Défendre nos idéaux, travailler ensemble à la réforme et promouvoir le bien-être de Taiwan

Estimés chefs d’Etat et de gouvernement, hôtes distingués, chers compatriotes d’outre-mer, chers concitoyens et chers amis qui nous regardez peut-être à la télévision ou sur Internet,

bonjour !

L’importance historique de la cinquième élection présidentielle au suffrage universel direct : vers une démocratie mature

Le 14 janvier s’est tenue la cinquième élection présidentielle au suffrage universel direct de la République de Chine. C’est une étape importante dans le cheminement de la démocratie taiwanaise vers la maturité. Ces élections libres et équitables ont fait la démonstration du haut degré de civisme de l’ensemble de l’électorat qui a été salué par la communauté internationale. Je voudrais pour ma part féliciter mes adversaires, la présidente du Parti démocrate-progressiste, Tsai Ing-wen, et le président du Parti pour le peuple, James Soong, pour l’esprit démocratique avec lequel ils ont accepté les résultats de l’élection. Chers amis, acclamons tous ensemble la démocratie de Taiwan !

Regard sur les quatre années qui viennent de s’écouler : les réformes portent leurs premiers fruits et la nation est de nouveau sur la bonne voie

En revenant sur les quatre années passées, je voudrais d’abord exprimer ma gratitude envers mes concitoyens pour leur soutien. Ensemble, nous avons affronté les assauts du tsunami financier mondial, et la croissance économique de Taiwan est revenue à des niveaux comparables à ceux affichés par les autres dragons asiatiques.

A Taiwan, nous avons fait face ensemble aux destructions apportées par le typhon Morakot en août 2009, et nous avons reconstruit les zones sinistrées. Nous avons restauré l’intégrité dans les affaires publiques, sauvegardé l’esprit de la Constitution et fait progresser l’équité et la transparence de la justice. Nous avons également réformé et rationalisé l’Etat ; et plusieurs grandes villes ou grands districts ont par ailleurs été fusionnés ou ont vu leur statut s’élever. Il s’agit là de deux réformes capitales. En outre, nous avons réduit de façon significative notre consommation d’énergie et nos émissions de gaz à effet de serre, travaillé à une meilleure protection du droit au logement et grandement élargi la couverture sociale.

Nous avons également fait naître la période la plus pacifique de ces soixante dernières années dans les relations entre les deux rives, et ce faisant, nous avons gagné la confiance de nos partenaires diplomatiques de longue date et l’assentiment de la communauté internationale. Il en résulte que les citoyens de la République de Chine sont désormais exemptés de demande de visa par 127 pays et territoires.

Ici, je souhaite remercier tout particulièrement l’ancien Vice-Président de la République Vincent Siew, l’ancien Premier ministre Liu Chao-shiuan, l’ancien Premier ministre Wu Den-yih, le Premier ministre Sean Chen et tous les membres du gouvernement, ainsi que le Yuan législatif, sous la présidence de Wang Jin-pyng. En collaborant étroitement avec les citoyens au cours de ces quatre dernières années, ils ont tous rendu d’énormes services à la nation. Je les remercie sincèrement pour leurs efforts et leur contribution, et je continuerai d’avoir recours à leur expertise et à leur sagesse.

Une décennie d’or : les cinq piliers de la compétitivité de Taiwan

Pour les quatre années à venir, je m’engage à travailler avec la population tout entière à réaliser la vision d’une « décennie d’or » pour la nation. Notre objectif est de construire une nation jouissant de la paix, de la justice et du bien-être. Le gouvernement a identifié cinq piliers du développement national. En premier, la puissance des moteurs de la croissance économique sera augmentée. En second, l’accent sera mis sur les créations d’emplois et la justice sociale. Troisièmement, le gouvernement encouragera la réduction des émissions de gaz à effet de serre et une plus grande utilisation des énergies vertes. Quatrièmement, la culture sera considérée comme une source de puissance nationale. Et cinquièmement, tous les efforts seront fournis pour former, recruter et retenir les talents. La réalisation de ces objectifs permettra de renforcer considérablement la compétitivité internationale de Taiwan, de façon que, durant ces quatre années, Taiwan accomplira une transformation complète et améliorera davantage encore le bien-être de sa population.

Développer la puissance des moteurs de l’économie est la première étape du renforcement de la compétitivité de Taiwan, les deux principaux moteurs étant l’approfondissement de la libéralisation des échanges et la consolidation de l’industrie.

Nous avons noté l’entrée en vigueur, en mars dernier, de l’accord de libre-échange signé par les Etats-Unis et la Corée du Sud, et la Chine continentale s’apprête à négocier un accord de ce type avec le Japon et la Corée du Sud, dans les mois qui viennent. Nous devons donc accélérer la libéralisation de notre économie : il n’est plus temps d’attendre. Pour que le monde s’ouvre à Taiwan, Taiwan doit commencer par s’ouvrir au monde. En ces temps de restructuration de l’ordre politique et économique mondial et de glissement du centre de gravité économique du monde vers l’Asie, nous devons abandonner nos idées protectionnistes et réviser les législations datant d’une autre époque. Nous devons éliminer toutes les barrières artificielles au commerce et à l’investissement et créer à Taiwan un environnement économique véritablement libre et ouvert qui soit plus en phase avec les pratiques internationales.

Nous avons prévu de créer des zones franches modèles, dont une à Kaohsiung. Il s’agit d’une étape cruciale alors que Taiwan se transforme en une « île du libre-échange ». Il nous faut achever rapidement les négociations découlant de l’Accord-cadre de coopération économique (ECFA) signé entre les deux rives et accélérer les négociations des accords de coopération économique en vue avec des partenaires économiques importants comme Singapour et la Nouvelle-Zélande. D’ici huit ans, nous devons être prêts à rejoindre le Partenariat Trans-Pacifique et saisir cette opportunité historique d’approfondir notre intégration dans le commerce mondial.

Notre secteur industriel a été l’auteur de nombreux succès spectaculaires mais présente aujourd’hui des goulets d’étranglement qui entravent sa croissance. A l’avenir, nous nous efforcerons de renforcer le tissu industriel et, en nous appuyant sur le modèle passé de production fondé sur la recherche de l’efficacité, de construire un nouveau modèle, basé sur l’innovation et la création de valeur. Notre stratégie consiste à incorporer dans le secteur industriel les caractéristiques spécifiques de celui des services, tout en introduisant dans ce dernier des éléments technologiques et internationaux, et en mettant en avant les qualités uniques de nos industries traditionnelles. Ainsi seulement notre industrie gagnera-t-elle en diversité et créera-t-elle davantage de valeur ajoutée. Et c’est aussi de cette façon que notre industrie pourra vraiment réussir sa transformation et se constituer une niche imprenable dans l’économie mondiale.

Le second pilier du renforcement de la compétitivité de Taiwan est la création d’emplois et le renforcement de la justice sociale. La libéralisation engendrée par la mondialisation a eu pour conséquence de mondialiser également la compétition sur le marché du travail. La création d’emplois passe par une croissance économique soutenue, et cette croissance doit entraîner l’augmentation des salaires dans l’ensemble de l’économie, sans quoi elle n’aurait pas de sens. En outre, nous devons fermement défendre l’équité et la justice, réduire les disparités entre les riches et les pauvres, et nous assurer que les fruits de la réussite économique sont partagés par tous.

Une des priorités sera d’assainir les finances de l’Etat. Nous avons entrepris d’« ajuster les prélèvements fiscaux en fonction des capacités contributives de chacun » et d’instaurer une « justice fiscale », de construire un système de sécurité sociale complet et de préserver les intérêts fondamentaux des personnes défavorisées. Dans le même temps, nous devons allouer les investissements de façon rationnelle dans les infrastructures de base, les services publics et les ressources éducatives, et nous devons concevoir un modèle de développement régional équilibré, s’appuyant sur des caractéristiques locales. Ceci permettra de réduire les disparités de développement entre les zones urbaines et rurales, et les citoyens auront alors des opportunités égales quels que soient leur sexe, leur lieu de résidence, leurs origines ou leur statut social.

Le taux de natalité de Taiwan est en baisse depuis longtemps et la population connaît un vieillissement rapide. Ces tendances ont des conséquences sur la sécurité nationale et, à ce titre, il est nécessaire de formuler une politique démographique visionnaire, d’instituer un programme d’assurance santé et un programme de retraites bien pensés, de mettre en place rapidement un système de prise en charge de la dépendance et de prendre des mesures supplémentaires dans le domaine de l’accueil des enfants en âge préscolaire afin de mieux répondre aux besoins des parents et des enfants.

La justice est là pour garantir les droits et intérêts de la population. Au cours des quatre années passées, nous avons achevé la rédaction de la Loi sur la célérité de la justice, la Loi sur la magistrature et la Loi gouvernant les affaires familiales, et nous avons créé l’Agence de lutte contre la corruption. Par le passé, la Cour suprême refusait de dévoiler la façon dont les juges se voyaient attribuer tel ou tel dossier. Cette pratique est désormais révolue. La justice doit être indépendante mais ne doit pas s’isoler du reste de la société, et elle ne doit pas se comporter d’une manière défiant le sens commun et les attentes de la population. Au cours des quatre prochaines années, je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour promouvoir la réforme de la justice de manière à ce que celle-ci suive les évolutions de notre société. Je veux que le système judiciaire, qui fut transplanté depuis l’Occident il y a un siècle, prenne vraiment racine à Taiwan afin que les citoyens fassent leurs les principes et valeurs de l’état de droit et de la protection des droits de l’homme.

La troisième direction à suivre pour renforcer la compétitivité de Taiwan est de développer un environnement caractérisé par de faibles émissions de gaz à effet de serre et un fort recours aux énergies vertes. Le changement climatique et le déséquilibre entre les ressources disponibles et la demande représentent un défi mais aussi une opportunité pour Taiwan. A l’avenir, toutes les industries à travers le monde mettront l’accent sur la production verte. Face à ce nouveau champ de compétition industrielle, les modes de consommation devront être modifiés de manière à répondre aux impératifs de conservation de l’énergie et de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Nous encourageons donc les secteurs privés à accroître la recherche et développement et les investissements dans les industries vertes, dans l’architecture verte et dans la production verte pour que l’industrie verte devienne un moteur de la croissance et des créations d’emplois. Pour atteindre notre objectif et faire de Taiwan une « île des énergies vertes et des émissions de gaz carbonique réduites », nous devons continuer à promouvoir un développement durable afin de laisser aux futures générations un ciel bleu, de l’air pur, de riches ressources en eau, des montagnes et des forêts luxuriantes, ainsi que des rivières, des marais et des océans pleins de vie.

Nous allons adopter des mesures pour rationaliser les tarifs de l’énergie, promouvoir les économies d’énergie, la réduction des émissions de gaz à effet de serre et l’augmentation des investissements dans les industries vertes. Nous devons ramener les prix des carburants et les tarifs de l’électricité en phase avec les mécanismes du marché. Il faut non seulement mettre en œuvre le principe selon lequel l’utilisateur paie mais aussi répondre aux attentes de la population vis-à-vis des entreprises nationales, en améliorant leur gestion afin de créer un environnement mutuellement bénéfique pour les consommateurs comme pour les producteurs.

Le quatrième pilier consiste à faire de la culture une source de puissance nationale. La culture taiwanaise a trois caractéristiques : un esprit civique profondément établi, une parfaite conservation des cultures traditionnelles ainsi qu’une transition souple et des passerelles sophistiquées entre tradition et modernité. C’est la démocratie qui a permis à notre société civile de devenir ce qu’elle est aujourd’hui. C’est une société dans laquelle un environnement ouvert et l’esprit démocratique nourrissent la créativité. Sur ce terreau fait d’ouverture et de liberté, les arts de la scène traditionnels tels que l’opéra taiwanais et les spectacles de marionnettes à gaine ont été préservés, et des troupes contemporaines de renommée internationale comme la compagnie de danse Cloud Gate ou le groupe de percussions Ju ont pu se développer. Ainsi, la quête d’excellence dans les hautes technologies et l’internationalisation s’accompagne d’une volonté de donner à tous un large accès à la culture.

Seule une société ouverte peut engendrer une ébullition créative, et une imagination sans bornes ne peut être tolérée que dans un climat de liberté. La créativité taiwanaise gagne le cinéma, la musique pop et l’édition, formant une industrie culturelle qui joue un rôle de premier plan au sein du monde chinois. Cependant, elle doit trouver le moyen de mieux s’intégrer dans le secteur économique, de manière à ce que, en produisant de la valeur ajoutée par la créativité et l’utilisation des mécanismes de la propriété intellectuelle, nous puissions commercialiser notre culture dans le monde entier et transformer sa valeur intrinsèque en retombées économiques, lesquelles ne pourront que nourrir encore davantage les talents créatifs.

La culture ne se limite pas à l’art, à la créativité ou à un secteur économique. Elle fait aussi partie de la vie quotidienne. Récemment, l’écrivain chinois Han Han a fait part d’anecdotes qui l’ont marqué lors de son séjour à Taiwan : un chauffeur de taxi qui avait restitué à son propriétaire un téléphone portable oublié dans son véhicule, ou encore un opticien qui n’a pas hésité à faire un long détour pour apporter son aide. Ces rencontres ont laissé sur lui une impression profonde. De manière similaire, il y a peu, un chauffeur de taxi de Hualien, Zeng Shi-cheng, a découvert que son passager japonais avait oublié son portefeuille sur la banquette arrière. Il est retourné rapidement vers le port mais le ferry à bord duquel le touriste s’était embarqué avait déjà quitté le port. Un remorqueur a alors pris le ferry en chasse et, finalement, le portefeuille a été retourné à son propriétaire à l’aide d’un panier suspendu à un câble tendu entre les deux bateaux. Je pense que de telles actions reflètent la gentillesse et l’honnêteté, valeurs centrales de la culture chinoise qui font aujourd’hui partie de la vie quotidienne des Taiwanais.

Nous devons considérer la culture comme une source de renforcement de la nation. Le développement culturel est celui de la force nationale. Investir dans la culture équivaut à investir dans le renforcement de la nation.

Le cinquième pilier pour soutenir la compétitivité de Taiwan est de cultiver, recruter et retenir les talents. Puisque Taiwan manque de ressources naturelles, les talents sont notre ressource la plus importante et la clé du développement national.

Nous devons transformer nos universités et nos établissements d’enseignement supérieur en pépinières de talents locaux et en sources de compétitivité nationale. Qui plus est, nous devons adopter des politiques ouvertes et tournées vers le futur, et créer un environnement vivable, agréable, international, non discriminatoire et compétitif sur le plan salarial de manière à retenir nos meilleurs talents tout en en recrutant dans le monde entier. En chinois, nous parlons de « construire un nid pour attirer le phénix » – en d’autres termes, « bâtissez un nid et ils viendront ».

Les enfants sont notre préoccupation permanente. Chaque enfant, qu’il soit riche ou pauvre, devrait avoir la possibilité de développer ses talents et d’avancer – c’est là le principe même de l’éducation. En fait, de nombreux Taiwanais brillent dans leur domaine respectif, tels Ang Lee et Xiao Qing-yang dans le domaine culturel et artistique, Billy Chang et Chen Hsing-he sur les pistes du Cirque du soleil, ou encore Johan Ku et Jason Wu dans le monde de la mode internationale et du design. Au cours des quatre dernières années, des étudiants taiwanais ont remporté les premiers prix dans diverses foires internationales consacrées à l’invention ou au design. Taiwan recèle des talents et une créativité exceptionnels. Nous devons travailler davantage à la formation des nouvelles générations en instaurant une scolarisation obligatoire de 12 années, afin que chaque enfant puisse donner le meilleur de lui-même.

Si nous voulons voir notre nation se développer, alors nous devons réformer ; si nous voulons réformer, alors nous devons supporter les douleurs passagères de l’ajustement. Nous ne pouvons absolument pas nous défausser sur les générations futures. Je suis particulièrement conscient que, réélu président, ma mission et mon devoir les plus importants sont de travailler avec la population pour améliorer le bien-être de tous. Au cours de mon second mandat, nous avancerons d’un pas ferme, tout en communiquant régulièrement et en profondeur avec le public pour gagner son soutien. Le but de mon second mandat est de m’appuyer sur ces cinq piliers pour « renforcer le bien-être à Taiwan ». Pour survivre, et pour que le bien-être de sa population soit garanti, Taiwan a besoin de devenir plus compétitif.


Les trois pierres angulaires de la sécurité nationale : la paix à travers le Détroit, une diplomatie viable et une défense forte

La sécurité nationale est cruciale pour la survie de la République de Chine. Je pense que la sécurité de Taiwan repose sur trois pierres angulaires. La première est le rapprochement entre les deux rives pour faire régner la paix dans le détroit de Taiwan. La deuxième est l’élargissement de l’espace international de Taiwan grâce à une diplomatie viable. La troisième est le renforcement des capacités de défense face aux menaces extérieures. Il nous faut accorder la même importance à chacune de ces pierres angulaires et les renforcer de manière équilibrée.

La première pierre angulaire, comme je l’ai indiqué, est le rapprochement entre les deux rives pour assurer la paix dans le détroit de Taiwan. Au cours des quatre dernières années, le gouvernement a relancé des négociations institutionnalisées à travers le Détroit, signé 16 accords bilatéraux et fait du rapprochement entre les deux rives une réalité. Ce faisant, nous avons respecté loyalement les principes de « parité », de « dignité » et de « réciprocité », ainsi que celui exigeant de « donner la priorité à Taiwan pour le bien de sa population ». La branche exécutive a rendu des comptes au Parlement de manière ouverte et transparente, et elle a renforcé sa communication avec les partis d’opposition dans la perspective de forger un consensus national sur cette question. Cette approche a permis d’instaurer des garde-fous institutionnels dans le processus de rapprochement entre les deux rives.

Au cours des quatre dernières années, nous avons amélioré les relations entre les deux rives et réduit la tension dans le Détroit. Cette démarche a apporté la paix et la prospérité et a reçu un large soutien de la part de la population taiwanaise.

Néanmoins, une partie de la population continue à émettre des réserves au sujet de notre politique continentale. Je voudrais ici rappeler solennellement que la Constitution de la République de Chine est la référence suprême pour ce qui a trait à la manière dont le gouvernement gère les relations à travers le Détroit. A l’intérieur de ce cadre constitutionnel, notre politique trans-Détroit doit maintenir le statu quo caractérisé par la formule « pas d’unification, pas d’indépendance et pas de recours à la force », et promouvoir le développement de relations pacifiques entre les deux rives du Détroit sur la base du Consensus de 1992, selon lequel chaque partie reconnaît l’existence d’« une seule Chine » mais en conserve sa propre interprétation.

Quand nous évoquons « une seule Chine », nous faisons naturellement référence à la République de Chine. Selon notre Constitution, le territoire souverain de la République de Chine inclut Taiwan et le continent, mais aujourd’hui, le gouvernement de la République de Chine n’exerce sa souveraineté que sur Taiwan, Penghu, Kinmen et Matsu. En d’autres termes, depuis une vingtaine d’années, la Constitution définit les deux rives du détroit de Taiwan au moyen de la formule : « une République de Chine, deux régions ». Cette définition est restée inchangée pendant les mandats de trois présidents.

Cette définition est éminemment rationnelle et pragmatique, et elle permet d’assurer le développement à long terme de la République de Chine et de préserver la sécurité de Taiwan. Les deux rives du détroit de Taiwan devraient regarder cette réalité en face, rechercher un terrain commun tout en respectant leurs différences, et forger un consensus sur « la non-reconnaissance mutuelle de souveraineté et la non-dénégation mutuelle de la capacité à gouverner ». C’est seulement de cette manière que les deux rives pourront aller de l’avant avec confiance.

Au cours des quatre dernières années, nous avons développé les interactions à travers le Détroit en abordant « les dossiers urgents avant ceux qui le sont moins, les problèmes faciles à résoudre avant les plus difficiles, et les dossiers économiques avant les dossiers politiques ». Cette approche a produit des succès sans précédent dans les domaines des relations économiques et commerciales, des transports maritimes et aériens, de la santé publique, de la culture, de l’éducation, de l’entraide judiciaire et des services financiers.

Dans les quatre prochaines années, les deux rives du Détroit doivent ouvrir de nouvelles aires de coopération et poursuivre leurs efforts pour consolider la paix, étendre la prospérité et renforcer la confiance mutuelle. Nous espérons aussi que les organisations civiques des deux rives du détroit de Taiwan auront davantage d’occasions d’échanger et de dialoguer, en particulier dans les domaines de la démocratie, des droits humains, de l’état de droit et de la société civile, de manière à créer un environnement plus propice au développement pacifique à travers le Détroit.

Les populations des deux rives du Détroit partagent un même héritage chinois. Le même sang coule dans nos veines et nous avons une histoire et une culture communes. Nous vénérons tous le père fondateur de la nation, Sun Yat-sen. Nous ne pouvons oublier sa vision d’un « monde en partage » ni les idéaux de liberté, de démocratie et de distribution équitable des richesses sur lesquels il a fondé la nation.

L’expérience démocratique de Taiwan prouve qu’il n’est pas impossible pour des institutions démocratiques inspirées de l’étranger de s’enraciner dans une société chinoise. J’attends avec ferveur l’ouverture graduelle, sur le continent, à une participation plus active de la population au processus politique, en même temps que des progrès francs en matière de droits de l’homme et d’état de droit, et qu’un développement autonome de la société civile. Cela réduira d’autant le sentiment d’altérité entre les populations des deux rives du détroit de Taiwan.

La deuxième pierre angulaire de notre sécurité nationale est la mise en œuvre d’une diplomatie viable permettant d’élargir notre espace international et de renforcer notre contribution à la communauté internationale. Au cours des quatre dernières années, plutôt qu’une « diplomatie de la terre brûlée », nous avons choisi une « diplomatie viable » qui joue « cartes sur table », en apportant une aide extérieure en accord avec les principes suivants : « choix d’objectifs appropriés, respect de la loi, bonne gouvernance ». Nous avons entrepris des projets de coopération avec nos partenaires diplomatiques, et ces derniers ont sans relâche parlé en notre faveur au sein des organisations internationales. Nous avons restauré une confiance mutuelle avec les Etats-Unis, à travers une coopération étroite dans de nombreux domaines. Cela nous a permis de renforcer nos canaux de communication et de construire avec ce pays le « partenariat économique et de sécurité » le plus solide de ces 30 dernières années. Nous avons aussi accompli des progrès remarquables dans notre relation avec le Japon. En plus de l’ouverture d’un nouveau bureau de représentation dans ce pays, nous avons également accompli des progrès en matière de relations aériennes, de culture et d’investissements, notamment. Notre « partenariat spécial » avec le Japon traduit le fait que les relations bilatérales sont les plus amicales des 40 dernières années. L’Union européenne (UE) et le Parlement européen ont à de nombreuses occasions publié des communiqués et adopté des résolutions exprimant leur soutien à notre politique continentale et leur volonté de construire des liens économiques et commerciaux plus forts avec Taiwan.

L’élargissement de notre espace international a constitué une importante avancée. Ces trois dernières années, et après une absence qui aura duré 38 ans, nous avons participé en tant qu’observateur à l’Assemblée mondiale de la santé, et en 2010, nous avons accédé à l’Accord plurilatéral sur les marchés publics dans le cadre de l’Organisation mondiale du commerce. Les faits prouvent que les progrès réalisés dans les relations à travers le Détroit n’entravent en rien l’élargissement de notre espace international. Au contraire, les deux peuvent même s’avérer complémentaires. Au cours des quatre prochaines années, nous intensifierons notre participation aux organisations internationales, en particulier aux travaux des agences des Nations unies spécialisées dans le changement climatique et l’aviation civile. Nous avons aussi l’espoir qu’au sein des organisations non gouvernementales internationales, les deux rives du détroit de Taiwan feront preuve de tolérance mutuelle et s’entraideront de façon à renforcer ce cercle vertueux.

Quand il s’agit de contribuer davantage à la communauté internationale, Taiwan peut s’appuyer sur son capital le plus précieux. Je veux parler de la vitalité de ses organisations civiques et de l’esprit solidaire de sa population.

Quand, en janvier 2010, Haïti a été frappée par un séisme de forte magnitude, j’ai appelé Chen Shun-tian, le chef de notre équipe de secouristes, qui avait été dépêchée sur les lieux du désastre. A l’autre bout de la ligne, j’ai entendu des cris de joie : seulement 15 minutes avant, ils avaient pu dégager quelqu’un des décombres. C’était une première pour notre nouvelle équipe de secours international. Quand, au mois de mars de l’année dernière, le Japon a été touché par le tsunami, 6,6 milliards de dollars taiwanais de dons ont été récoltés grâce aux efforts conjugués des secteurs privé et public. Ce montant n’était pas seulement le plus important au monde, mais il excédait aussi l’ensemble des sommes données par plus de 90 pays. Une jeune fille de Tainan, Cai Yu-hua, s’est aussi rendue sur les lieux du désastre pour, discrètement, y aider les personnes âgées. Les Japonais et les Taiwanais ont été profondément touchés par sa compassion. Et au cours de mon voyage en Afrique, en avril dernier, j’ai rencontré un médecin, le Dr Huang Qi-lin, qui exerce sur place depuis près de 20 ans. Pendant toutes ces années, ce médecin taiwanais a travaillé avec chaleur et dévouement. Ces exemples traduisent une passion pour la vie et une résistance à toute épreuve. Ils ont aussi valu à Taiwan une amitié sincère.

La troisième pierre angulaire de notre sécurité est une défense nationale forte, capable de dissuader les agressions extérieures. Un ancien proverbe dit : « Même si le monde est en paix, l’impréparation au combat ouvre la porte aux dangers ». Nous ne recherchons pas le conflit mais nous ne le craignons pas non plus. Au cours des quatre dernières années, nous avons accompli des progrès significatifs vers une plus grande indépendance dans la production des armements nécessaires à notre défense. Nous avons renforcé nos capacités de combat de dernière génération et nos forces militaires sont formées aux opérations de prévention des catastrophes et de sauvetage. Dans le même temps, nous avons renforcé nos programmes d’entraînement et amélioré de manière conséquente la préparation physique et l’aptitude au combat de nos soldats, tout en restaurant la discipline et en prévenant et en éliminant la corruption. Voilà les résultats concrets de nos efforts visant à renforcer notre degré de préparation militaire.

En ce qui concerne les contrats d’armement passés avec l’étranger, les Etats-Unis ont approuvé trois ventes d’armes à Taiwan depuis que je suis en fonctions, pour un montant total de 18,3 milliards de dollars américains, transactions qui excèdent les précédentes tant par leur montant cumulé que par leur qualité. Cela nous assure, pour l’avenir, des capacités de défense appropriées qui donneront à l’Etat et à la population la confiance et la volonté nécessaires à l’approfondissement de relations stables et solides avec l’autre rive du Détroit.

Au cours des quatre prochaines années, nous continuerons à nous procurer les armes défensives que nous ne sommes pas en mesure de produire nous-mêmes, et nous terminerons le passage à une armée de métier. Des mesures d’accompagnement seront prises dans ce domaine. Et, sur la base d’une stratégie de « défense solide comme un roc » et de « dissuasion efficace » et d’un concept « asymétrique et innovant », nous établirons une force de défense nationale aux effectifs réduits, certes, mais professionnelle et robuste. Dans le même temps, nous améliorerons nos relations avec les pays voisins, participerons activement aux affaires internationales et promouvrons l’établissement de canaux institutionnalisés pour un dialogue et une coopération stratégiques en vue de défendre la souveraineté de la République de Chine, de sauvegarder la sécurité de Taiwan et de contribuer résolument à la paix régionale.

Un tournant historique : un nouveau siècle, un bon commencement

Chers compatriotes, en me retournant sur les quatre dernières années, mon cœur s’emplit d’une profonde gratitude. Nous avons résisté au tsunami financier mondial et célébré dans la joie le Centenaire de la République de Chine. Nous avons pleuré sur les blessures infligées par les cataclysmes et nous nous sommes réjouis des exploits de nos compatriotes.

Nous sommes une famille et Taiwan est notre maison à tous. Nous croyons fermement que quelles que soient les différences entre les partis de la majorité et de l’opposition, nous formons toujours une seule famille. Malgré les nombreuses difficultés qui ont marqué, au cours des dernières années, les relations entre la majorité et l’opposition, je crois que nous partageons le même engagement pour la démocratie. Sur cette base, nous pouvons certainement progresser vers un consensus et travailler ensemble à la résolution des problèmes. Pendant les quatre dernières années, j’ai en permanence appelé les organisations civiques au dialogue. J’espère sincèrement ouvrir le plus tôt possible un dialogue avec les responsables de l’opposition. Nous montrerons au peuple que la majorité et l’opposition ne sont pas seulement en concurrence mais qu’elles peuvent aussi coopérer. Pour le bien de tous les Taiwanais, travaillons ensemble afin d’établir un bon exemple dans le cadre de la démocratisation de Taiwan.

De ce point de vue, en cette 101e année de la République de Chine, nous nous tenons à un tournant historique. Nous savons les difficultés que nos aïeux ont rencontrées au cours du siècle passé. En nous tournant vers celui qui commence, nous avons une vision claire des défis et des opportunités futures de la nation. Je suis honoré d’être celui à qui la direction du pays est confiée alors même que la République de Chine entre dans son deuxième siècle. Il s’agit là d’une grande responsabilité.

A travers cette cérémonie solennelle et sacrée, j’accepte une fois de plus, avec les membres du gouvernement, les responsabilités qui nous ont été confiées par le peuple. Une telle responsabilité pèse lourdement sur nos épaules. Nous devons rester conscients des risques auxquels nous sommes confrontés, tout en faisant tout ce qui est en notre pouvoir pour remplir nos devoirs, tels qu’il sont prévus par la Constitution, de manière à ce que nous puissions être à la hauteur des responsabilités que nous ont confiées les citoyens de ce pays.

Me tenant sur la ligne de départ de ce nouveau siècle pour notre République, j’espère que le travail que nous accomplissons maintenant assurera une fondation solide sur laquelle nos enfants pourront progresser. Les graines que nous semons aujourd’hui produiront des fruits dont profitera la prochaine génération. Soyons fidèles à nos idéaux, travaillons ensemble pour approfondir la réforme et assurons un plus grand bien-être pour Taiwan.

Merci !

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