05/05/2024

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Politique

Start-up et innovation : Bpifrance explore des partenariats à Taiwan

17/01/2017
Laure Reinhart (au centre) a notamment été reçue à l’ITRI, ici aux côtés de Christophe Legillon (2e à d.), directeur de Business France Taiwan.
Aimable crédit de l’ITRI
Laure Reinhart, directrice des Partenariats à la direction de l’Innovation de Bpifrance, la banque publique d’investissement française, a passé une semaine à Taiwan, du 9 au 13 janvier 2017, sur l’invitation des ministères taiwanais des Affaires étrangères et de l’Economie. Elle dresse pour Taiwan Info un premier bilan de cette visite.  

Etait-ce votre première visite à Taiwan ?
J’étais venue il y a près de 30 ans en tant que chercheur à l’Institut national de recherche en informatique et automatique (INRIA), dans le cadre d’un congrès scientifique consacré aux transferts de technologies. Ce qui m’avait frappée à l’époque était la très forte activité dans les rues de Taipei, liée au développement industriel de l’île. Aujourd’hui, Taipei est une ville bien structurée, et l’on ressent à Taiwan une ouverture d’esprit très importante et une volonté considérable de coopérer avec la France. J’ai été accueillie ici d’une façon extraordinaire, avec une vraie volonté d’ouverture, beaucoup de simplicité et des approches assez directes, y compris lors de mon entrevue avec le ministre adjoint de l’Economie, Shen Jong-chin [沈榮津]. Cela permet d’aller plus vite pour l’établissement d’une relation.

Au cours de cette semaine à Taiwan, vous avez rencontré divers acteurs publics et privés de l’investissement, du financement et du soutien aux entreprises, ainsi que des start-up. Qu’en retenez-vous ?
J’ai rencontré de nombreuses start-up à Hsinchu, à l’accélérateur Orange Fab Taiwan, ainsi qu’à Garage+. La différence majeure entre la France et Taiwan est qu’il n’y a pas à Taiwan d’équivalent de Bpifrance, une banque publique pouvant accorder aussi bien des petites subventions pour aider les start-up à démarrer que d’investissement dans des entreprises stratégiques sur des fonds souverains. Mais les différentes composantes de l’écosystème taiwanais sont relativement proches, pour chacune d’entre elles, des activités que nous menons. Par exemple, en termes d’incubation d’entreprises, Taiwan a les mêmes préoccupations sur le financement et l’accompagnement, avec le même niveau de maturité qu’en France. Concernant les partenariats entre la recherche scientifique et industrielle, ce qui existe dans le cadre des pôles de compétitivité français se retrouve à Taiwan coordonné par le département des technologies industrielles du ministère de l’Economie, avec à peu près les mêmes façons de fonctionner. En matière d’aide aux petites et moyennes entreprises (PME), les approches sont aussi très semblables, me semble-t-il.
 
Nous sommes aussi assez complémentaires. Selon certains, Taiwan manque de technologies de rupture – un point dont je ne suis pas complètement certaine car j’ai vu à l’Institut de recherche sur les technologies industrielles (ITRI), à Hsinchu, des choses très convaincantes. Mais peut-être la France peut-elle apporter des savoir-faire en matière de design, alors que Taiwan est clairement plus fort en matière de prototypage et de fabrication. Une des pistes à explorer pourrait être, pour des entreprises françaises ayant des problèmes d’industrialisation, de s’adresser à des entreprises taiwanaises. Les entreprises françaises perçoivent souvent un danger à travailler avec l’Asie, notamment en termes de propriété intellectuelle. Ce qui est intéressant avec des programmes taiwanais comme TRIPLE (Taiwan Rapid Innovation Prototyping League for Entrepreneurs), c’est d’avoir accès à des petites entreprises pour le prototypage et l’industrialisation, avec une forte sécurité en termes de propriété intellectuelle, en tout cas tel que ce programme nous est présenté.


Taiwan est parfois décrit comme excellant dans l’innovation incrémentale davantage que dans l’innovation radicale. Son développement économique a aussi donné la part belle aux entreprises à forts capitaux, plutôt qu’à l’innovation dans le domaine des services ou des applications. La France ne dispose-t-elle pas justement d’un savoir-faire dans ces domaines ?
Il existe des start-up françaises réussissant dans le domaine du hardware, comme Famoco qui est présente à Taiwan, mais c’est vrai que la France compte beaucoup de start-up dans les activités logicielles, un domaine où nous sommes assez innovants et où nous avons la chance d’avoir un organisme de recherche, l’INRIA, très ouvert aux applications industrielles et à l’international. L’INRIA dispose d’ailleurs d’accords de coopération avec des organisations de recherche à Taiwan. On pourrait effectivement marier des innovations matérielles avec des innovations logicielles, pratique de plus en plus courante avec les objets connectés et le développement industriel de l’intelligence artificielle, à l’image des exosquelettes que nous avons pu voir à l’ITRI.
 
L’un des objectifs de votre visite était d’explorer la possibilité de partenariats. A quels niveaux ceux-ci pourraient-ils être envisagés ?
Je pense d’abord à des objectifs permettant des retombées immédiates. Le premier pourrait concerner l’organisation d’une manifestation dédiée à Taiwan dans le cadre du Hub de Bpifrance, à Paris. Celui-ci propose une série d’événements baptisée Eldorado et mettant en lumière l’écosystème des start-up de différents pays. Un événement Eldorado consacré à Taiwan pourrait donner une image extrêmement positive auprès de la communauté des start-up françaises. Un autre objectif pourrait être de tester avec une entreprise française ayant des problèmes d’industrialisation les solutions proposées par Taiwan.

A moyen terme, il nous faut approfondir la proposition du Bureau du développement industriel, au ministère taiwanais de l’Economie, consistant à lancer un programme de collaboration pour des entreprises souhaitant se lancer sur le marché, et cela en utilisant des dispositifs existant déjà de part et d’autre, de manière à ne pas déstabiliser les entreprises.

Il faut ensuite poursuivre nos échanges d’informations, pourquoi pas, comme l’a proposé le ministre adjoint de l’Economie, en organisant une réunion annuelle consacrée aux start-up, une année en France et l’année suivante à Taiwan. Il existe déjà une rencontre annuelle entre les administrations française et taiwanaise en charge des PME, mais je parle ici de rencontres concrètes avec les entreprises, s’appuyant sur l’expérience de celles déjà présentes à Taiwan, et vice-versa. Cela correspond à la mission de la Bpifrance : partir du concret et expérimenter des solutions.
 
En termes de financement, Taiwan a par exemple mis en place avec la Nouvelle-Zélande un fonds conjoint pour les entreprises innovantes des deux pays. Ce genre de modèle intéresse-t-il la BPI pour sa relation avec Taiwan ?
Aujourd’hui, ce besoin n’existe pas car il n’y a pas suffisamment d’entreprises mais cela pourra être un élément d’une spirale positive, au fur et à mesure que les relations s’intensifieront et que les besoins naîtront.
 
La French Tech Taiwan a été labellisée comme « hub » en 2016. Quelles en sont les retombées possibles pour les entreprises taiwanaises ? Quel sera le rôle de la Bpifrance dans ce dispositif ?
La French Tech est une opération destinée à faire connaître la force de la création d’entreprises en France. Le fait d’avoir un hub French Tech à Taiwan est très positif car cela permet d’y valoriser la création de start-up en France. A Taiwan, cela crée une forme d’enthousiasme et attire des personnalités taiwanaises très intéressantes, à l’image de Steve Hsu [徐竹先], passé par l’ITRI et fondateur de TXA. Bpifrance est un opérateur de la French Tech et promeut à ce titre un certain nombre de programmes, comme le French Tech Ticket. Une entreprise taiwanaise en a bénéficié lors de l’appel à projets de 2015, et deux autres ont été sélectionnées lors de l’appel à projets de 2016. En les accueillant, nous allons pouvoir mieux les connaître et suivre leur développement.

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