Taiwan Today

A l’occasion du Salon du livre de Paris, un prix littéraire des lycéens, apprentis et stagiaires de la formation professionnelle de la région Ile-de-France a été remis le 22 mars à l’auteure taiwanaise Lin Li-chin [林莉菁] pour son roman graphique Formose, paru en 2011 aux éditions Çà et là. Elle y raconte son enfance à Taiwan, tiraillée entre la culture de sa famille et la pensée officielle du régime du Kuomintang (KMT). « Grâce à vous, ce livre sur un petit pays trop longtemps dans l’ombre de la Chine pourra être lu par beaucoup de gens ! », s’est réjoui Lin Li-chin en recevant son prix et en remerciant chaleureusement les lycéens des Yvelines qui l’ont sélectionnée. « Quand j’étais jeune, a-t-elle poursuivi, je n’ai pas eu votre chance : j’étais sourde et muette parce qu’on ne m’avait pas appris l’histoire de mon pays… Formose est la confession d’une lycéenne ignorante. » Roman graphique écrit en français et récemment publié à Taiwan en langue chinoise, Formose retrace sur un mode autobiographique le parcours d’une jeune Taiwanaise née en 1973 dans le sud de l’île. Avec humour et tendresse, Lin Li-chin décrit sa scolarité, alors marquée par la domination du mandarin et par l’enseignement de l’histoire officielle, laquelle tendait à rabaisser l’histoire locale et passait notamment sous silence le massacre ayant suivi l’incident du 28 février 1947. L’auteur dépeint aussi l’amertume et le dégoût qui l’ont saisie quand, devenue étudiante en histoire, elle a entendu pour la première fois évoquer la Terreur blanche et les crimes du régime. Elle adopte ensuite un regard particulièrement critique sur l’état de la jeune démocratie taiwanaise. Formose est sorti l’an dernier dans les librairies taiwanaises, son texte étant pour l’occasion réécrit par l’auteur en mandarin. « Je n’imaginais pas que ce livre puisse être publié à Taiwan ni y trouver un public, en partie parce que le roman graphique est une forme littéraire inhabituelle dans l’île mais aussi parce que je pense que le régime actuel continue à y manipuler l’opinion des gens. Bien sûr, c’est mon point de vue, mon interprétation. On n’a le droit de ne pas être d’accord », a-t-elle déclaré à Taiwan Info. Créé en 2012 à l’initiative de la Région Ile-de-France et avec le soutien de la Maison des écrivains et de la littérature, ainsi que des Académies de Créteil, Paris et Versailles, ce prix littéraire veut donner aux jeunes le goût de lire, développer leur créativité et leur sens critique, et les sensibiliser aux métiers du livre. Au total, huit ouvrages ont été primés cette année et vont être distribués dans les 469 lycées et 163 centres de formation des apprentis d’Ile-de-France.