Dans un effort de conserver et de renforcer les valeurs culturelles nationales, le président Chiang Ching-kuo, alors Premier ministre, entreprit la construction d'un centre culturel dans chaque circonscription administrative de l'île de Taïwan. Ce projet fut donc inclus dans le plan des Douze Grands Travaux d'infrastructure soumis en septembre 1977 à l'approbation du Yuan législatif.
Son successeur à la tête du Cabinet, M.Sun Yuan-suan, entreprit donc dès 1979 la construction de ces centres culturels après avoir élaboré un programme d'encouragement des activités culturelles et éducatives. A cause du manque d'informations précises sur les arts folkloriques à Taïwan, le ministère de l'Education ordonna en 1980 aux facultés d'éthnologie et de sociologie de l'université nationale Chengchi à Taïpei et aux facultés d'archéologie et d'anthropologie de l'université nationale de Taïwan d'entreprendre des recherches dans ce domaine.
Les premiers résultats de cette grande enquête indiquaient qu'il existait à Taïwan 316 artistes agréés en art dramatique chinois venant de Chine continentale, chacun s'étant spécialisé dans le style dont il était originaire, du Hopei, Honan, Hounan, Foukien, Foutcheou (dans cette dernière province), Kouang tong, Tchaotcheou (dans cette dernière province), Chânsi, Chansi et les régions du fleuve Bleu (Yangtseu kiang) et de la [rivière] Houaï.
Quelque 335 autres artistes s'étaient spécialisés dans divers arts dramatiques de la province de Taïwan, notamment l'opéra, la musique de théâtre, les marionnettes d'ombre, à gaine ou à fils, et la musique lyrique traditionnelle des écoles du Sud, le nankouan [南管], et du Nord, le peikouan [北管].
On dénombra environ 1 160 artistes sachant déclamer et chanter, le chouo tchang [說唱], ou interpréter de la musique folklorique. Beaucoup étaient de grands virtuoses en chants aborigènes, foukiénois ou hakkas. D'autres excellaient dans la récitation de contes ou le chouo-chou [說書], dans le dialogue comique ou le siang-cheng [相聲], le chant rythmé au tambour ou le ta-kou [大鼓], et la récitation de contes et légendes en dialectes du Sud ou le tan-tseu [彈詞], la musique du Chantong, le chant épique du Yunnan de l'Ouest, la musique de fête, funèbre ou religieuse.
La Tchen-cheng-che. une troupe du nan-kouan, répétant sans ses apparats traditionnels. (Photo : Lin Bor-liang)
Plus de 560 artistes et artisans se spécialisaient dans l'art traditionnel, la plupart dans la sculpture et le tissage, mais aussi dans la poterie, la peinture, le laquage, l'émaillage, l'impression et la teinture, la broderie, le découpage de papier, le montage d'image, le travail sur métaux et le damasquinage.
La danse et l'acrobatie traditionnelle intéressent un peu plus de deux mille autres artistes. Beaucoup sont spécialisés dans la danse du lion, du tambour, de Song Kiang (d'après le héros du grand roman des Ming, Au bord de l'eau), et celle de la roue et du tambour ; et d'autres dans divers styles de danses folkloriques ou aborigènes de Taïwan ou de Chine continentale. Enfin il y a tous les maîtres de danse particulière, comme celle du dragon, de la charrue à bœufs, du combat de taureau, du cheval, des échasses, sans parler des acrobates, gym nastes traditionnels, joueurs de diabolo, athlètes de kong-fou (kung-fu), de mimique et de magie. Malheureusement, tous ces artistes se sont maintenant retirés ou ont disparu, aussi cherche-t-on à conserver leur art.
Les sept équipes ont été formées pour effectuer ces recherches. Elles ont ptudié plus de cent arts dans le domaine du théâtre, du chouo-tchang, de la musique et de l'artisanat. Elles ont également répertorié plus de 4 000 artistes et artisans de tout genre, publié des brochures d'information et fourni divers matériaux en faveur de la promotion des arts folkloriques. Leurs résultats ont été distribué aux divers organismes de l'Etat, bibliothèques, associations privées et spécialistes concernés et ont été d'une aide précieuse à l'élaboration d'une politique en faveur de la culture et des arts.
Ces dix dernières années, la protection gouvernementale de la culture et les arts folkloriques a été très positive. Pour en améliorer la qualité de l'enseignement, le ministère de l'Education a tenu plusieurs universités d'été réunissant enseignants et étudiants dans la recherche des arts traditionnels. Y ont participé l'université normale nationale de Taïwan, l'académie des beaux-arts de Taïwan, l'Ecole d'art dramatique Fuhsing et le Corps des jeunesses de Chine.
Prenant d'autres mesures pour intégrer ces arts traditionnels dans la vie courante, il a organisé des manifestations artistiques diverses, comme le festival des arts de Taïpei, qui ont soulevé un vif intérêt parmi la population et aidé à une meilleure compréhension des arts folkloriques traditionnels. Les autorités culturelles provinciales et municipales y ont également participé.
Le grand pas en faveur des arts folkloriques à Taïwan a eu lieu en mai 1982 quand le gouvernement fit voter concernant la conservation des biens culturels. Elle fait une large obligation à soutenir les programmes culturels. En novembre 1982, il arrangeait une « Sélection des grands maîtres en arts folkloriques ». En 1984, c'est au tour du ministère de l'Education de prendre les mesures concrètes pour la conservation et la promotion de l'artisanat et des arts nationaux. Il instituait formellement une coopération et une coordination entre les différents échelons de l'administration publique, les établissements universitaires et scolaires, et les associations privées spécialisées. Depuis 1985, il décerne cinq prix du patrimoine culturel en théâtre traditionnel, musique, danse, chant et arts plastiques pour récompenser tous ceux qui, par leurs actes, ont manifestement contribué à la promotion, au maintien ou à l'enseignement des arts folkloriques traditionnels. La remise de ces prix est retransmise sur le petit écran dans l'espoir d'attirer une plus grande attention du public à ce domaine. Plus de 77 personnes et 25 groupes ont ainsi été honorés. En juin 1989, il a récompensé deux sculpteurs sur bois, deux marionnettistes, deux musiciens et un chanteur d'opéra comme premiers prix de la sélection nationale.
(Photo : Lin Tien-fu)
La grande responsabilité de la conservation et de la promotion des arts folkloriques revient maintenant à la commission d'Etat de qui fut institué sous la tutelle du Yuan exécutif pour coordonner la planification et le développement de la culture. Elle dirige également les 18 centres culturels de la province de Taïwan qui possède tous, à part celui de la ville de Sintchou, un centre d'intérêt artistique particulier et s'occupe également des:
- Village culturel des aborigènes formosans du Lac du Soleil et de , dans le centre de Taïwan, qui est administré par les aborigènes et s'est ouvert en juillet 1987.
- Village culturel des aborigènes de Taïwan, administré par le gouvernement provincial et s'est ouvert en juillet 1988.
- Parc de l'artisanat et des arts folkloriques, en construction et bientôt ouvert au public.
- « Monde d'hier» dans le Centre de loisirs et d'éducation des enfants de Tàipei, qui présente tous les arts folkloriques traditionnels chinois. En cours de construction, il sera incessamment mis à la disposition du public.
- Village culturel du folklore rural dans le hsien de Yunlin, qui est en cours d'étude.
Elle organise chaque année un festival d'art dramatique depuis 1982 qui comprend des représentations et des manifestations éducatives de musique, de chanson, de théâtre, d'acrobatie, de marionnettes et divers autres arts et produits de l'artisanat traditionnel. Les autres festivals annuels sont des génies folkloriques de Loukang, hsien de Tchang-houa; l'Exposition des arts et coutumes ruraux à Hiuékia (Hsuehchia), hsien de Tàinan; les Festivals aborigènes des moissons des hsien de Houalien, Taïtong et Pingtong; et le Carnaval chinois de Taïtchong.
Pour encourager les arts folkloriques et la culture traditionnelle, le ministère de l'Education et la commission d'Etat de ont intensifié leurs contacts avec les écoles supérieures d'arts et les autres organisations publiques ou privées dans le but de mieux comprendre et mieux enseigner les arts folkloriques. D'autres projets, comme les centres d'information, de recherches, d'expositions, de représentations et un institut de recherches sur le patrimoine culturel chinois sont à l'étude, ainsi que la tenue d'expositions, de représentations, de séminaires et de jeux publics pour animer l'intérêt du public dans les arts folkloriques. Même si ces programmes sont encore actuellement au stade préliminaire de leur élaboration, ils témoignent de la grande volonté des autorités et de la population de freiner le déclin malheureux des arts folkloriques traditionnels à Taïwan. ■
Lin En-hsien, Professeur à l'Institut des études régionales frontalières de à l'université nationale Chengchi (Taïpei).