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Le Tour de Taiwan passe par les étoiles

01/07/2015
Le Tour de Taiwan s’érige progressivement en un des principaux rendez-vous du cyclisme asiatique et mondial. (Photo aimablement fournie par l'Association de cyclisme du Taipei chinois)
Le Tour de Taiwan 2015 a eu lieu du 21 au 25 mars, juste après le Salon international du vélo de Taipei. Cette année, les organisateurs avaient invité 188 coureurs professionnels originaires de 32 pays, l’occasion pour ces derniers de tester l’asphalte insulaire au cours de cinq étapes en cinq jours. Certaines de celles-ci avaient été imaginées pour être particulièrement piquantes à l’image de l’étape de montagne qui avait de quoi tester la résistance physique et le moral des caciques de la petite reine. Feng Chun-kai [馮俊凱], un des rares Taiwanais à avoir signé avec une équipe internationale, était sur son terrain. A l’issue des précédentes éditions du Tour de Taiwan (2012, 2013, 2014), il avait décroché le maillot blanc à pois rouge, soit le titre envié de « meilleur grimpeur ». Cette année, il s’est battu pour faire honneur à son pays et briller sur les routes qui sont témoins de sa carrière de sportif.

Se distinguer dans le monde cycliste

Avec ses cinq étapes, le Tour de Taiwan 2015 est parti de Taipei, a filé vers Taoyuan et a poursuivi sa route dans le district de Changhua, jusqu’au pied des massifs montagneux. Là a débuté la quatrième étape, la plus difficile, destinée à couronner le « roi de la Montagne » (King of the Mountain, KOM, à ne pas confondre avec la course du même nom organisée chaque année à l’automne). Comme dans chaque épreuve des courses classées et reconnues par l’Union cycliste internationale (UCI), les coureurs devaient accumuler des points dans différentes catégories, comme les sprints ou les montées – des performances mesurées au cours des différentes étapes ayant toutes leurs spécificités. Les coureurs qui remportaient le plus de points dans chacune de ces catégories pouvaient alors prétendre au maillot correspondant, le vert par exemple pour le meilleur sprinter ou le blanc à pois rouges pour le meilleur grimpeur.

Pour le Tour de Taiwan, 2015 a été l’année de la montagne. C’est en effet la première fois que l’île s’est dotée d’une telle étape, celle-ci débutant au Centre des visiteurs de Xiangshan, près du lac du Soleil et de la Lune, pour passer par la région de Tatajia, sur le mont de Jade, et finir à Alishan. Le défi extrême proposé aux plus chevronnés s’étalait sur une distance totale de 109 km. Sans surprise, elle a attiré des grimpeurs du monde entier.

Cette année, Feng Chun-kai a échoué dans l’épreuve de montagne pour une poignée de points. Il avait bien réussi à s’imposer sur les 89 premiers kilomètres, mais il s’est ensuite laissé dépasser. Il a décroché dans les derniers kilomètres de montée, cédant aux pressantes attaques de l’équipe iranienne, pour finir à la 81 place.

Le grand vainqueur de cette année est l’Iranien Mirsamad Pourseyedigolakhour. Il a non seulement pris le maillot jaune en individuel, mais a aussi gagné le maillot bleu avec le titre de meilleur coureur asiatique et le fameux maillot blanc à pois rouges de meilleur grimpeur. Trois couronnes pour un seul homme, le grand chelem en somme !

Déjà vainqueur du Tour du Japon, il faut dire que Samad Pourseyedi était le favori de ce Tour de Taiwan 2015. A l’issue de la course, il a qualifié cette épreuve de « compétition de l’année ». C’est dire si cela a été dur. « Dès que j’ai appris qu’une étape de montagne de ce niveau de difficulté était inscrite, je me suis senti encore plus en confiance parce que je sais que c’est en montée que je peux faire la différence », déclarait-il après la course, sans fausse modestie.

Feng Chun-kai, un coureur qui a l’expérience des grandes courses internationales, souligne que le Tour de Taiwan est mieux classé à l’échelle internationale depuis que l’étape de montagne lui donne une nouvelle dimension. En conséquence, les équipes venant se mesurer aux montagnes de l’île ont aussi gagné en qualité.

Se hisser au sommet

Le premier tour de Taiwan a été organisé en 1978 à l’initiative de King Liu [劉金標], le fondateur de Giant, la célèbre marque de vélos. A cette époque, la course démarrait de Taipei et se poursuivait sur les routes provinciales du sud en longeant la côte ouest pour revenir vers le nord par les routes magnifiques et escarpées de la côte est. Il fallait une semaine pour faire la boucle. Mais ces dernières années, grâce à un effort de promotion soutenu mené par l’Association cycliste du Taipei chinois (CTCA), le Tour de Taiwan a pris du galon pour passer de la catégorie 2.6 à la catégorie 2.1 selon la réglementation de l’UCI. Désormais, le Tour de Taiwan est considéré comme l’une des courses les plus intéressantes et les plus difficiles d’Asie et les organisateurs espèrent la faire passer en catégorie supérieure (2.HC) dès l’année prochaine.

Lee Kai-chih [李開志], le secrétaire général de la CTCA, s’en réjouit : « Toute la transformation du Tour de Taiwan a pour objet de convaincre que l’île est réellement le royaume du vélo. Nous avons fait évoluer cette course d’une compétition presque confidentielle organisée par quelques entreprises et dotée de prix peu attractifs en un évènement sportif d’ampleur internationale rassemblant désormais un nombre important de coureurs étrangers, avides de se mesurer dans un tel contexte montagneux. » Signe que le tour est en train de s’ériger en un grand rendez-vous du cyclisme mondial, un nombre inédit de photographes et de réalisateurs se sont aussi déplacés. Clou du spectacle, quatre drones ont été utilisés pour montrer les meilleurs moments de la compétition tandis que les chaînes de télévision de l’île se sont mobilisées pour relayer chaque minute de cet évènement sportif, mais aussi pour distiller la passion du cyclisme à des Taiwanais encore peu versés dans cette culture sportive.

Pierre Hutsebaut, qui conseille le Tour de l’Amérique, une course homologuée par l’UCI, estime que compte tenu des capacités organisationnelles de Taiwan, il ne devrait pas y avoir d’obstacle ni d’objection chez l’UCI au fait d’élever le Tour de Taiwan au rang 2.HC. La question est de savoir si l’évènement peut attirer suffisamment de sponsors. « Il ne s’agit pas simplement d’un évènement sportif. Il y a un très grand nombre de considérations commerciales impliquées dans le processus de décision. Le marketing a en plus son mot à dire », dit-il.

Le tracé du Tour de Taiwan passe par des paysages merveilleux, ce qui lui donne une dimension supplémentaire. (Photo aimablement fournie par l'Association de cyclisme du Taipei chinois)

Le mois du cyclisme à Taiwan

Déjà en 2005, il fallait décupler l’impact médiatique du tour de Taiwan et attirer plus de sponsors. On a donc déplacé la date de la course de septembre à mars, pour la faire correspondre au moment où se tient le Salon international du cycle de Taipei. En conséquence, le mois de mars est littéralement devenu le mois du vélo à Taiwan.

En plus d’être le salon international du cycle le plus couru d’Asie, c’est aussi le deuxième plus important dans le monde, avec plus de 10 000 acheteurs faisant le déplacement. L’édition de 2015 s’est ouverte le 18 mars et s’est installée au Centre de commerce international, dans le quartier de Xinyi, et au Centre des expositions de Nangang. On pouvait y découvrir les technologies dernier cri appliquées au vélo de compétition et présentées par les meilleures marques mondiales. Evidemment, les stars de la petite reine, venues disputer le Tour, se sont prêtées à toutes sortes d’activités promotionnelles imaginées par les sponsors et ont participé aux évènements médiatiques autour du salon, drainant ainsi les foules, curieuses de cette culture de la bicyclette déclinée sur le mode de la performance sportive. Pour les grandes marques du secteur, la présence de ces sportifs reconnus étaient une aubaine, tandis que les petites entreprises locales se sont bousculées pour tirer parti de cet évènement, vendre leurs produits et construire leur image de marque.

Une magnifique promenade en suant

Le tracé du Tour de Taiwan fait évidemment la part belle aux richesses paysagères dont l’île regorge, ce qui offre un parfait sujet secondaire pour les médias internationaux qui viennent suivre la course.

Lors de la quatrième journée du tour, l’étape de montagne a débuté près du lac du Soleil et de la Lune, dont les paysages sont saisissants. La longue ligne des coureurs s’est ensuite étirée jusqu’à Tatajia, dans le Parc national de Yushan, à 2 610 m, où le trajet serpentait à travers les magnifiques massifs de la chaîne de montagnes centrale, avant de finir du côté du Parc national d’Alishan qui offre un des plus spectaculaires panoramas de la « belle île ». Bref, le Tour est en train de se construire une réputation enviable et promet d’attirer, au-delà de la stricte compétition sportive, un nombre croissant d’amateurs de beaux paysages.

Jasper Ockeloen, l’un des meilleurs grimpeurs de l’équipe hollandaise Parkhotel Valkenburg, explique qu’il a été particulièrement attiré par cette compétition du fait du défi représenté par les étapes de montagne : « La grimpe, c’est ma spécialité et en comparaison avec l’Europe, les routes de montagne de Taiwan sont plus longues et plus raides. C’est un test d’envergure pour votre résistance physique ». D’ailleurs, le sportif hollandais n’a pas lésiné sur sa préparation, s’offrant des séances spécialisées sur l’effort en montagne, loin des plates plaines de son pays. Et il est satisfait de sa septième place au classement général.

Il déclare toutefois une certaine frustration : une course de cette difficulté ne laisse pas vraiment le loisir d’admirer les magnifiques paysages que traverse le parcours. « Je vais revenir à Taiwan en basse saison pour prendre le temps de goûter ces vues inoubliables, mais également la cuisine qui va avec », dit-il.

2015 a été une grande année pour le cyclisme à Taiwan. En février, à l’occasion des championnats asiatiques de cyclisme qui se déroulaient en Thaïlande, Taiwan a ramassé neuf médailles d’or, inscrivant un nouveau record, tout en précisant sa réputation de tigre asiatique du cyclisme. En plus, l’édition 2015 du Salon international du cycle de Taiwan a été l’une des plus réussies et fréquentées de l’histoire de cet évènement, alors que les exportations de cycles de Taiwan ont bondi de 9%. Ce faisant, dans les rues sans pente de Taipei, les systèmes de location de vélos continuent de rencontrer un succès étonnant. Petit à petit, la belle île se transforme en île du vélo, ce qui devrait en plus plaire aux défenseurs de l’environnement.

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